De bonnes idées, mais des personnages un peu simples

La trilogie du Seigneur des Runes s’ouvre donc sur «La Douleur de la Terre». Le contexte est relativement simple: des monarchies «occidentales» se retrouvent opposées à un peuple qu’on peut qualifier de moyen-oriental, mené par un redoutable chef de guerre. Ce genre de contextes, on les as déjà vu (Druss la Légende et, dans une moindre mesure, Légende de David Gemmel; les Monarchies Divines de Paul Kearney;...). Dans le même temps, une menace plus grande, surnaturelle, est en train de monter (ce qui n’est pas sans rappeler un ouvrage peu connu nommé Le Trône de Fer (A Song of Ice and Fire) de George R.R. Martin. Ce n’est donc pas de ce côté qu’il faut aller chercher l’originalité.

Cette dernière réside essentiellement dans le système de magie. Pas (trop) de boules de feu et d’effets pyrotechniques ici, la plus grande partie des manifestations magiques résident dans les «Dons», rituels par lesquels un homme offre l’un de ses attributs (force, endurance, intelligence,...) à un autre. La puissance d’un Seigneur des Runes se mesure donc essentiellement au nombre de dons qu’il a reçu.

Dans l’ensemble, ce premier tome est plutôt convainquant. Ce n’est cependant pas le roman de fantasy du siècle ou de la décennie, la faute à des personnages mal équilibrés ou trop lisses (la dimension prophétique du héros n’aide à ce sujet en rien). Il y a bien quelques tentatives pour donner de la profondeur à certains personnages (le Seigneur-Loup, le garde du corps), mais elles sont immédiatement sabotées par l’auteur, trop attaché à la happy end que trouvera sans doute la trilogie.

Voilà pourquoi je lui attribue une note de 6/10. L’originalité du système de magie y est pour beaucoup, et il faut reconnaître que les scènes d’action sont plutôt bien écrites (ou du moins, traduites), et la possibilité rapidement évoquée d’un complot plus vaste parviens à intéresser le lecteur. Cependant, la volonté de l’auteur de sauver certains personnages en dépit du bon sens (je pense à une scène de dilemme cornélien que ceux qui liront le livre sauront reconnaître) enlève à cette saga toute prétention de se classer dans la Dark Fantasy. Car, n’ayons pas peur de le redire, on ne s’inquiète pas réellement pour la survie des personnages principaux, malgré quelques tentatives de l’auteur pour montrer qu’il y aura des morts (dont une seule, totalement gratuite, est réellement réussie).

Ceci étant dit, je compte bien attaquer le deuxième tome, et je finirai probablement la trilogie, en espérant que les personnages gagneront en substance.