Cendrillon au pays des cons (j’ai pas d’idées putain)

Les romans de Freida McFadden ont connu un vif succès depuis leurs lancements. Les secrets de la femme de ménage et son prix babelio du meilleur thriller de l’année en 2024 sans oublier son prédécesseur La femme de ménage, best-seller de 2022 - qui nous intéresse ici.

Le résumé est le suivant, en gros, Millie, fraîchement sortie de prison, désespère de ne pas trouver un travail avec son casier, elle qui ne demande que de recommencer à zéro, d’avoir une seconde chance dans la vie. Et un beau jour, la riche famille Winchester lui propose un job de bonne à tout faire, une offre qu’elle ne peut refuser au vu de ses nombreux avantages… mais peut-être est-ce trop beau pour être vrai.

Et rien qu’au résumé affiché sur la quatrième de couverture, une part de surprise part en fumée. Voilà pourquoi je m’estime heureux d’avoir commencé la lecture sans que je m’y sois intéressé mais l’entame n’est pas non plus grisante car pour autant et pour peu qu’on ait déjà mangé quelques thrillers, les premières lignes sont une déception tant elles accumulent les tropes de manière procédurale.
Et on chope déjà là un des problèmes majeurs du livre, une structure trop criarde.
Divisé en trois parties, le récit se tire une balle dans le pied quand bien même il en va de sa singularité et de son originalité. La démarche est louable mais ça le fait pas. La partie 1 est une introduction par un point de vue particulier, dont les secrets et nombreux fusils de Tchekhov sont logiquement amenés à ressurgir dans les parties suivantes pour briser la progression de notre héroïne.
Et à ce stade, l’histoire se lit sans déplaisir, mais sans plaisir non plus, à part peut-être celui très naïf où dans un monde juste, notre Millie tombe dans les bras de son prince charmant à l’instar d’un Cendrillon… mais nous savons tous que nous sommes en face d’un thriller.
Donc ouais, cette introduction offre un déroulé très caricatural et manichéen, si bien qu’elle lui ait difficile de cacher ses véritables intentions avec ses gros clins d’œil à la Mickey, ceux du style « c’est un outil qui nous servira plus tard ».
Ajoutez à ça quelques très lourdes répétitions, des influences mal camouflées mal ingurgitées qui peinent à faire s’émanciper la narration et à se forger une identité propre (You, Parasite, et j’en passe).
Un trop plein qui se ressent jusque dans le mix des genres qui passe de comédie romantique à l’eau de rose au thriller psychologique en passant par de véritables instants et scènes horrifiques jusqu’au rape & revenge. Autant dire que ça fait beaucoup et fatalement, difficile pour la tonalité de savoir sur quel pied danser.
Et pour enfoncer le clou, on te bazarde des twists à tout va et des nouveaux points de vues en cours de route. Quelque chose de bien spectaculaire pour chokbar comme il faut. Une approche charmante mais qui témoigne d’un manque clair d’intentions… et c’est tout autant un problème.

Car s’il y a bien une chose qui reste en suspens au bout du compte, c’est bien ce que l’autrice a voulu dire. S’il y a bien quelques pistes ici et là, rien n’est fait pour les étoffer et elles disparaissent aussi vite qu’elles sont venues. Lutte des classes, l’homme est un loup pour l’homme (enfin surtout pour les femmes), bah merci mais l’analyse ne vole pas haut. Néanmoins, il y a bel et bien une envie qui tarde tant à poindre qui semble être le véritable moteur de tout ce Schmilblick, c’est l’esprit de sororité. Le hic, c’est qu’il est suffisamment voilé et/ou repoussé qu’il ne peut prétendre à porter le tout de son écho. Et c’est bien triste tant les œuvres qui ont réussi à le faire trôner fièrement n’en sont que plus reconnus. Si vous n’avez pas envie de chercher très loin, il y a Les Graines du figuier sauvage au cinéma au moment où j’écris ces lignes (27 septembre 2024).
Avec La femme de ménage, c’est maladroit, compliqué, si bien qu’on a de tristes impressions d’avoir un plot taillé pour les profs Netflix oubliables ou pire encore, un truc qui frôle dangereusement Petits secrets entre voisins ou le jour où tout a basculé.
Donc sur le fond comme sur la forme, on tient un semi-échec, tout au plus la belle esquisse d’un travail qui aurait mérité une direction thématique plus précise au lieu de sacrifier ses choix et de laisser tout tomber au profit du spectaculaire facile et bateau… mais très efficace, il faut l’avouer. Preuve en est, on ne tarde à venir à bout des 400 pages et quelque et on cartographie parfaitement l’espace et on dresse facilement le portrait des personnages.
Donc ouais, donnez ça à un réalisateur ou une réalisatrice et il pourra retravailler tout ça, se réapproprier l’écrit, l’adapter, et ça pourrait donner un bon film pour pas cher.

Donc sympa, attachant, mais bon… c’pas foufou, pas tip top coolos.

PS : Je conseille vivement de lire La femme de ménage en VO, dans sa langue d’origine, car les traductions sont trop littérales en français alors qu’on aurait pu proposé des équivalences en français. Donc faire prévaloir la langue d’origine permet à mon humble avis de mieux cerner les caractères des personnages. Voilà, aller ciao, bonne lecture.

Smathy
6
Écrit par

Créée

le 27 sept. 2024

Critique lue 323 fois

3 j'aime

Smathy

Écrit par

Critique lue 323 fois

3

D'autres avis sur La Femme de Ménage

La Femme de Ménage
alcidabava
8

Divertissant

Certes le plot twist pouvait être prévisible, certes ce n'est pas de la grande littérature, mais tout à fait ce dont j'avais besoin pour me détendre un soir d'hiver. Impossible à lâcher, je l'ai fini...

le 19 déc. 2024

1 j'aime

La Femme de Ménage
Angélita
5

Critique de La Femme de Ménage par Angélita

La femme de ménage de Freida McFadden, présentationSera-t-elle arrêtée à cause de ce que la police va trouver en haut, soit un cadavre ?Trois mois plus tôt, Millie passe un entretien d’embauche pour...

le 26 sept. 2024

La Femme de Ménage
Lazydad
10

Un scénario diabolique et infernal de bout en bout

Diabolique ! Le scénario de ce formidable roman vous happe dès les premières pages et maintient la même tension angoissante jusqu’à la dernière page. Machiavélique et sulfureux, c’est l’un des...

le 26 août 2024

Du même critique

Falling
Smathy
5

Il peut pas caner le vieux ?

Premier passage de Viggo Mortensen derrière la caméra et c’est une petite déception. Le fait est que le sujet est fort, que tout ce qui s’y passe est déchirant, qu’on essaye de nous installer tous...

le 21 mai 2021

6 j'aime

Les Fantasmes
Smathy
5

Des pathologies plus que des fantasmes

Les fantasmes est un film à sketch retraçant l’un après l’autre les fantasmes hors du commun d’une poignée de couple. Naturellement et avec un postulat comme celui-ci, les situations semblent...

le 22 août 2021

4 j'aime

The Call
Smathy
7

Toujours des bons thrillers avec ces coréens

Jusqu’au bout je me suis dit que ce que j’étais en train de voir serait un de mes meilleurs visionnages de 2020. Bon même si je m’étais un poil emballé, c’est dire autant la surprise fait plaisir...

le 24 févr. 2021

4 j'aime