Cette œuvre d’Orwell est tout simplement fabuleuse. Même si l’intrigue est bien connue, même si on connait l’histoire des régimes dont il est la satire grinçante ; ce livre est captivant, passionnant, du début à la fin. Ou comment nous assistons impuissants ligne après ligne, paragraphe après paragraphe, page après page, chapitre après chapitre à cette longue descente vers le totalitarisme, à cette perversion de l’idée originale et de ses principes fondamentaux. Le tour de force d’Orwell n’est même pas de parvenir à critiquer la dictature ou les personnes avides de pouvoirs, ni même d’amorcer ces changements ici ou là, ces basculement de la pensée, ces revirements de convictions/opinions des personnages créant des paradoxes.
Non, la force est que même en tant que lectorat averti et éclairé, on en vient à douter, à hésiter sur ce qui a été dit. La force est de parvenir à dresser tableau fortement inspiré d’une situation, mais de pouvoir l’adapter à toute situation semblable et même à y trouver encore de nos jours des points communs. La force n’est pas tant de dénoncer tel ou tel régime, tel ou tel comportement ; c’est bien celle de nous amener à réfléchir sur le pouvoir, qui le détient et comment il l’utilise, sur notre situation sociale, sur nos convictions. Plus encore, on pourrait y voir un mode d’emploi d’une révolution ratée, un guide pour contrôler nos dirigeants et leurs dérives. Une œuvre qui en devient transcendante, écrit dans le style exquis de son auteur.
Conte social merveilleux, une fable au discours social toujours d’actualité et toujours aussi pertinent. Une œuvre fondamentale, une lecture nécessaire, un régal bienvenu. Voilà ce qu’est La Ferme des Animaux.