J'avais adoré Le chuchoteur et L'écorchée à leur sortie respective, mais depuis, allez savoir pourquoi, je m'étais tenue loin de Donato Carrisi. J'avais volontairement fui toutes critiques sur ce livre, pour me garder la surprise, mais n'avais pu échapper à quelques échos, qui jugeaient ce roman bien en dessous des précédents de l'auteur.
Au bout de quelques pages, j'ai commencé à comprendre pourquoi. Moi qui m'attendais à un thriller très sombre je me retrouvais avec une banale enquête de disparition de mineur sans aucun suspense ! La déception était donc de rigueur pendant les 60 premières pages...mais ça n'a pas duré longtemps, parce que le fond du livre est, malgré tout, passionnant !
Bien sur on suit le déroulement des recherches mises en place pour retrouver la jeune Anna-Lou, mais l'enquête sert uniquement de prétexte pour traiter du sujet principal : les médias et leur pouvoir sur l'opinion publique. L'auteur met à nu notre société, complètement dépendante des différents médias de communication, télévision en tête évidemment. Il soulève d'ailleurs des questions intéressantes : la présence des médias durant une enquête est certes inévitable, mais desservent-ils toujours l'enquête en cours ? Que penser de la possibilité de briser des vies en jetant les gens en pâture à la une des quotidiens ? Est-il possible d'utiliser sciemment les médias pour orienter l'enquête dans une certaine direction ?...
C'est justement ce que n'hésite pas à faire Vogel, flic antipathique au possible et totalement imbu de sa personne. Il a développé au fil des années une méthode quasi-infaillible : convoquer lui-même les médias sur place, falsifier quelques "preuves" au passage faire aller l'enquête dans son sens et désigner un coupable parfait... Dans ce cas, peu importe qu'il n'y ait pas l'ombre d'un indice, que le corps de la victime soit introuvable, ou qu'on ne déniche pas de mobile valable. Le commissaire, toujours tiré à quatre épingles, profite de l'occasion pour améliorer son image publique.
La construction du roman m'a beaucoup plu ! Basée sur de fréquents allers-retours dans le temps, chaque chapitre est une surprise : on peut vivre en direct le jour de la disparition, puis se retrouver soixante jours après les faits, le tout avec les point de vue de différents personnages. C'est pour moi un excellent moyen d’obtenir un récit rythmé et cela permet au lecteur d'avoir un point de vue global sur les évènements !
Au final, on doute, on imagine toutes les hypothèses, tout ça pour se dire qu'on a été royalement mené en bateau. La fin se termine de manière surprenante, c'est sacrément dérangeant !
Une fois de plus, j'ai passé un excellent moment avec cet auteur ! Il remet en question à la fois le système judiciaire et la surmédiatisation dans notre société. Simple fiction ou bien reflet de la réalité ? C'est là qu'on commence à s'interroger sérieusement ! L'intrigue est rondement menée et la plume de Donato Carrisi toujours aussi addictive. Ce dernier nous démontre l'étendue de son talent en nous livrant une enquête sombre sur fonds d'étude sociétale.
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