Mon coeur a bondi quand j'ai su que Thérèse Desqueyroux avait une suite, et l'épaississement psychologique m'a délecté car je n'en espérai pas tant !
La première partie de La Fin de la nuit est incroyable de nuances, complexités et ressorts psychologiques. On pourrait relire sans cesse le portrait de cette femme diminuée, et toujours en apprendre sur elle. L'intériorité de Thérèse, sa honte, son sentiment d'inadéquation, tout est scruté si habilement qu'on a l'impression d'être dans ses os. J'ai eu un temps de désoeuvrement quand le triangle s'installe, puis le final m'a ébloui à nouveau.
L'écriture de Mauriac m'a impressionné : ces paysages de Landes qui semblent refléter le désespoir sourd de Thérèse, cette relation à sa fille, le miroir qu'elle tend à Georges sur ses propres mesquineries... La déchéance de Thérèse est pathétique, le soin apporté aux détails prosaïques pour dire tout en un coup de pinceau est poignant : Anne sa servante, qui l'embrasse sur le front après l'avoir bordé comme son propre enfant, mais quelle force.
Peut-être que Thérèse est méprisable, moi je l'ai senti très humaine, l'archétype de la femme bourgeoise trop intelligente pour ne pas souffrir ? C'est une femme qui a raté sa vie, elle n'est pas dupe, elle en a la conscience aiguë. Que c'est douloureux.