La nuit sans fin
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le 3 avr. 2016
Kate Griffin, avec le premier tome de la série des Matthew Swift, guide le lecteur hors des sentiers traditionnels de la magie; dans A Madness of Angels, la magie appelle autant (voire plus) à l'émerveillement qu'aux incantations mystiques auxquelles nous avons tendance à l'associer, et anime Londres d'une vie bien à elle. Une histoire où le mondain devient merveilleux, où un magicien graffite ses sorts sur les volets d'un magasin, où une grille de sudoku abandonnée sur un banc sert d'offrande à une invocation.
Kate Griffin écrit sous plusieurs noms ; son nom de naissance, Catherine Webb est associé à des romans jeunesse, le pseudonyme Claire North à de la science fiction et des nouvelles, tandis que Kate Griffin se réserve à l'urban fantasy. Jeune romancière, elle a vécu toute sa vie à Londres et porte un grand amour à cette ville. Nombre de ses romans s'y situent.
Dans A Madness of Angels, le héros éponyme Matthew Swift remplace le pentagramme d'invocation par le panneau stop octogonal et peut utiliser les règles du métro pour empêcher les créatures sans tickets d'y entrer. Le concept est simple et brillant : la vie est magie. La magie de la vie, c'est son rythme, son énergie, les règles par lesquelles elle existe et les répétitions qu'elle connaît. La vie et ses règles seront différentes selon si elles se trouvent dans un petit village asiatique du treizième siècle ou dans une mégalopole européenne à notre époque. Afin de pratiquer leur art, les magiciens se servent de ce qui les entoure (du rythme, de l'énergie, des règles et des répétitions mentionnés précédemment), et auront donc une approche différente selon le lieu ou l'époque dans lesquels ils vivent. Ainsi, les magiciens urbains écrits par Kate Griffin sont l'évolution naturelle des magiciens traditionnels. Là où beaucoup de romans d'urban fantasy prennent des créatures traditionnelles telles quelles sont écrites dans les mythes et les placent dans un paysage urbain, A Madness of Angels décrit des golems faits de déchets, ou des nécromanciens habillés de sweat-shirts et en charge de pompes funèbres.
Deux ans après son meurtre inexpliqué, Matthew Swift se réveille dans une maison de Londres qui ne lui appartient plus. Pourchassé sans attente par un être mystérieux, il se met en quête d'alliés qui pourront l'aider à survivre à la menace qui plane au dessus de lui, et, pourquoi pas, la vaincre ?
Le personnage de Swift est intriguant dès les premières pages du livre. Il parle de sa personne en alternant la première personne du singulier et un « nous » mystérieux, dont le lecteur n'apprend l'origine que bien plus tard, dans une révélation menée de manière virtuose par l'auteur ; révélation jubilante qui m'a faite m'empresser de relire la première partie du roman afin de redécouvrir les subtils éléments qui présageaient de ce rebondissement. Swift est un drôle de mélange : la perception à fleur de peau qu'il a de son environnement et sa fascination presque enfantine sont touchantes. Elles contrastent vivement avec ses répliques parfois piquantes et pleines d'humour. Les dialogues sonnent authentiques, menés par une panoplie de personnages hauts en couleur et auxquels le lecteur s'attache avec une facilité déconcertante.
Par ses très longues descriptions fourmillantes de détails, ce roman n'est peut-être pas pour tout le monde, mais ce sont elles qui, à mon avis, en font une histoire sans précédent. Le style d'écriture, dense et poétique, aspire le lecteur et le place aux côtés de Swift pour lui montrer Londres telle qu'il la ressent : une ville où qui sait où chercher peut trouver des pépites d'émerveillement à chaque coin de rue.
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le 3 avr. 2016
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