Mieux vaut tard que jamais, il est temps d'éditer un peu ma critique. Visiblement le livre à finalement été édité en France sous le nom de "La Grève" et remplace l'ancienne version française de 1956 connu sous le nom de "La révolte d'Atlas". Celle-ci, inutilisable à cause de sa piètre traduction française, resta cantonné à d’obscures bibliothèques suisses. Il fut donc pendant longtemps préférable de commander une version anglaise, particulièrement la version éditée par Pinguin.
Quoi qu'il en soit, j'ai toujours été surpris de voir à quel point Ayn Rand est méconnu en Europe (sauf peut-être en Angleterre et encore je ne suis pas sûr). C'est d'autant plus surprenant que cette dernière est très populaire de l'autre côté de l'Atlantique. Ayant fuie l'URSS dans les années 1910 où tout les biens de sa famille ont été saisis par les révolutionnaires, Ayn Rand a passé sa vie à clamer son amour pour les valeurs américaines. S'en est suivi des livres comme The Fountainhead, Us the Living et bien sûr Atlas Shrugged, véritable bible américaine.
Dans ses livres, elle mélange essai philosophique et récit de fiction. Ce qui frappe d'abord, c'est que malgré la relative qualité du récit, le style de l'auteur est assez pauvre. Elle a appris l'anglais tardivement et ça se sent dans la répétition de certaines tournures de phrases et d'expressions. Au moins, ça rend la lecture pas trop difficile pour un non-bilingue. De plus il faut admettre que les héros de son histoires s'avèrent être de trop grand paragons de vertus pour être vraiment attachants. Elles n'aurait pas pût les rendre plus inhumains tant ils semblent au delà des contingences de la vie réelle (mention spéciale à John Galt). Mais l'histoire n'est qu'un prétexte et seul le message philosophique compte et il faut bien admettre que ce dernier s'avère assez enthousiasmant. En gros, Ayn Rand promeut la liberté individuelle, la propriété privée et la valeur du travail comme unique moyen de réaliser nos rêves. Pour elle, seul le capitalisme a la structure nécéssaire pour garantir ce type de société.
Le problème, c'est que la société idéale de l'auteur, Galt's Gulf, ne marche que parce qu'elle part du principe qu'un capitaliste est honnête par nature et finalement dénué de tout défaut et la ville fictive brille par l'absence de tout gouvernement (mais après tout pour quoi faire dans une ville peuplé de demi-dieux?). Et la société capitaliste ne comprend pour elle que le libre échange et pas toutes les institutions modernes (la bourse, les spéculateurs etc), ce qui rend le portrait incomplet. Cela dit la description de la société socialiste dominée par des gens comme James Taggart, utilisant le bien commun comme prétexte pour dissimuler leurs paniques face au monde qui change, fait étonnamment écho à notre société actuelle.
On peut donc taxer la narration d'une certaine naïveté dans la vision du capitalisme, surement en partie issue de la haine d'Ayn Rand pour le communisme, mais encore une fois seule la philosophie humaniste qui s'en dégage compte. L'homme ne doit pas contenter de rêver, il doit agir et travailler. Rien n'est offert, tout doit s'obtenir par le labeur. Nul ne peut rien imposer à personne, ni dans ses actes, ni dans sa manière de penser.
Bref, un très bon livre. Par contre, si lire un pavé de plus de 1000 pages en anglais vous effraie, The Fountainhead s'avèrera sans doute préférable. Sinon, Atlas Shrugged est un must-read pour quiconque veut comprendre la philosophie américaine moderne.