Dans un futur très lointain, grâce à des technologies à nulle a utre pareille, les hommes ont conquis l’univers et ont colonisé de nombreuses galaxies. Cependant, l’hégémonie terrienne n’empêche pas certains conflits « locaux » d’éclater, comme cette guerre de cinq ans qui vient de déchirer deux planètes voisines mais néanmoins ennemies, Skontar et Cundaloa. Après avoir réussi à mettre un terme au conflit, la Terre envoie un émissaire, Ralph Dalton, chargé de pérenniser la paix et d’apporter l’inestimable savoir-faire des « Soliens » – habitants du système solaire – aux deux civilisations, afin qu’elles entament la reconstruction de leur mondes ravagés. Une promesse de renouveau assujettie à une contrainte peu négligeable, puisqu’en échange des bienfaits de la race dominante, les extraterrestres devront peu à peu adopter son modèle de civilisation, abandonnant ainsi tout ce qui fait leur identité, leur caractère unique : leurs coutumes, leurs cultures, leurs modèles de société, mais aussi leur langage, leur philosophie, leur religion… Une assimilation quasi-totale dont des peuples au bord de l’abîme ne saisissent pas forcément toute l’ampleur.
Au cours des discussions qui doivent mettre en place ces accords déterminants pour le futur de leur société, les représentants des deux planètes ont deux attitudes radicalement opposées. Valka Vahino, l’ambassadeur de Cundaloa est tout miel avec les autorités humaines, dont il vante la sagesse et le savoir, alors que Skorrogar, le délégué de Skontar se montre grossier, visiblement peu soucieux de coopérer. De retour sur leur monde respectif, les deux émissaires doivent alors assumer les conséquences de leur position lors des négociations : à Vahino de recevoir les humains, qui vont apporter une aide illimitée à sa planète, et remettre en cause le modèle de vie de cette race de poète, incompatible avec les valeurs de travail et de progrès que les humains leur apportent ; à Skorrogar de subir les foudres de ses supérieurs, puisqu’il rentre totalement bredouille. Lequel des deux aura la tâche la plus lourde, la responsabilité la plus grave ? Peut-être pas celui que l’on croit… mais ce n’est qu’un demi-siècle plus tard que viendra la réponse.
Souvent brocardé et caricaturé dans l’hexagone – en gros, ce Poul Anderson qui a soutenu l’intervention américaine au Vietnam est un bon réac de la SF US – l’auteur de La Patrouille du temps alors à l’aube de sa longue carrière livre un texte sensible et humaniste, soulignant la nécessité pour chacun de rester ouvert à l’autre tout en gardant sa propre identité. Alors que certains s’inquiètent de la coca-colonisation galopante du monde, il est assez ironique de voir ce digne représentant de « l’impérialisme américain » prôner l’importance de la culture, de la diversité, du besoin pour chaque société de tracer son propre chemin, de s’affranchir des idéologies dominantes. La Main tendue offre donc l’occasion de redécouvrir Anderson sous son meilleur jour, alors pourquoi ne pas la saisir ?