La nuit a dévoré le monde par Florentin
Ce gentil petit titre et cette étrange couverture cachent une histoire d'apocalypse zombie assez originale (en tout cas pour ma faible connaissance du sujet). Parce que quand même, on imagine vite les échos de panique du monde entier, les regroupements de survivants, l'organisation de la survie et de la résistance, les forces humaines triomphantes face à la menace éradiquée - ou sinon les forces zombies dévorants les humains écrasés par le nombre, dans la version pessimiste - enfin de l'action, du suspens, du drame, tout ça.
Et en fait non. Là y a un mec, tout seul, et il attend. Ah, et il arrose ses fleurs des fois.
Pour le faire de manière plus attrayante : Antoine, qui est un petit écrivain de romans à l'eau de rose, s'endort dans l'appartement d'une amie qui donnait une soirée. Le lendemain, le salon est dévasté, rempli de sang et de cadavres, et les rues de Paris envahies de hordes de zombies et de quelques survivants désespérés qui finissent de se faire bouffer. Étant donné sa tendance naturelle à la solitude, Antoine fait le bon choix de ne pas bouger, et de se barricader dans l'immeuble, dans lequel il trouvera tout le nécessaire pour vivre et résister pendant plusieurs mois. Installé là, entre sa réserve d'armes, son piano, son rosier et ses boites de sardines, il cohabite désormais avec la masse uniforme des zombies qui erre sous son balcon. Il les considère tour à tour comme des ennemis, des prédateurs, des personnages de fiction, des lecteurs potentiels, pour finalement réaliser qu'ils sont l'humanité, et lui une exception marginale.
Sur ce fond de SF apocalyptique mixé à une bonne dose de Robinson Crusoé, entre trips horrifiques et réflexions sociologiques, Pit Agarmen (anagramme à démêler) réussit le pari d'un roman sympathique, étonnamment contemplatif sans être jamais lassant.