Décembre 1986, la famille de Caroline fuit le Chili et le régime de Pinochet pour venir s'installer au Québec. Du haut de ses sept ans, la petite fille sait que sa vie et celle de sa famille vont changer du tout au tout.
Adulte, elle nous raconte ses souvenirs d'enfance jusqu'à la trentaine et la maternité : l'arrivée à Montréal ; l'apprentissage du français et d'une culture entièrement nouvelle ; la lutte pour la survie dans un monde auquel l'on n'appartient pas, et que l'on doit faire sien malgré le dédain et le jugement des autres.
De petite Chilienne bruyante et vive qui aime les sandwichs au dulce de leche, elle devient petite québécoise travaillante et réservée qui ne réclame que des sandwichs au beurre de peanut ; quand sa mère s'intègre au pays avec Rock Détente en faisant des ménages et en s'usant les mains, elle s'immerge dans le Québec et sa langue avec Passe-Partout et l'Avalée des avalés, délaissant au fur et à mesure son espagnol natal soudain dépourvu d'utilité.
D'un hôtel d'immigrés sur Sherbrooke en passant par Ahuntsic, Hochelaga et Brossard, elle suit son bout de chemin pour devenir une Québécoise jusqu'au bout des ongles, pour étouffer le Chili qui vit en elle. Et de toutes ces expériences, de ces efforts et - souvent - des humiliations qui vont avec, elle va retirer une soif de justice sociale et développer une conscience politique qui vont la définir et façonner son destin.
Caroline Dawson signe avec Là où je me terre un roman d'une grande puissance. Avec sa narratrice, c'est le portrait de toute une génération d'immigrées qu'elle dresse ; de leur faim pour la vie, de leur combat pour la survie, de leurs espoirs d'un avenir plus digne, plus doux et brillant pour elles-mêmes et leurs enfants. De leur résilience.
Et que dire du style de l'autrice, saisissant et poétique, superbe. On ressort de cette lecture chamboulé·e·s, les yeux un peu plus ouverts.