Lorsque le jeune Francesco Sacredo revient à Venise en plein hiver après les quelques mois d'exil qui lui furent imposés suite à une violente altercation dans les ruelles de la Cité des Doges, il ne s'attend pas à voir sa vie transformée à ce point. D'abord la ville est prise dans une véritable gangue de glace tant l'hiver est sévère en ce XVIème siècle. Puis il apprend que son père est ruiné. Poussé à la ruine serait plus exact car l'homme est pris de jeu comme d'autres le sont de boisson et il y a perdu toute sa fortune. C'est la comtesse Mathilde von Wallenstein, une ignoble noble allemande borgne, qui a profité de ce revers de chance. Francesco est prêt à tout pour reprendre son héritage, mais la fougue de la jeunesse et un malheureux coup de dès le force à fuir de nouveau Venise car c'est lui-même qui s'est misé et perdu.
La comtesse est cependant bien déterminée à mettre la main sur son dû. Ainsi va-t-elle mettre à ses trousses deux frères, deux redoutables assassins qui vont le traquer au travers de toute l'Italie. Francesco fera preuve de clairvoyance et d'esprit d'initiative mais fera preuve d'une naïveté consternante dès qu'une femme sera mêlée à l'affaire.
On s'étonne que cet ouvrage récompensé par le prix Campiello 1986 ne soit traduit et paru en France qu'en 2009. Le prix Campiello est en effet l'équivalent italien de notre prix Goncourt, rien de moins. Heureusement il reste en ce pays de petites maisons d'édition qui préfèrent l'excellence littéraire aux aspects purement pécuniaires de la profession. Ce sont donc les éditions Anacharsis qui ont permis aux lecteurs français de découvrir ce roman qu'il aurait été dommage de ne pas traduire.
On regrettera l'excès de caricature dont on affuble le personnage de la comtesse von Wallenstein allemande – je lui aurais personnellement ajouté une jambe en bois - et la légèreté du jeune Francesco. Ceci dit, « La Partita » reste un bon roman d'aventure dans la droite ligne de l'œuvre d'un Dumas ou d'un plus récent Perez-Reverte malgré la mièvrerie propre aux histoires vénitiennes qui se déroulent pendant la Renaissance et qui confondent trop souvent le baratin sur le patrimoine culturel et les traditions populaires avec la trame narrative.
De plus, quand on parle de Dumas, on est bien loin ici du roman de cape et d'épées car elles ne servent, les pauvrettes, que de décorations vestimentaires dans cette histoire. Si aucune des caricatures et des poncifs de l'époque ne nous sont épargnés lors de ce récit, c'est essentiellement parce que les mésaventures du jeune Sacredo ne sont qu'un prétexte à une visite de l'Italie de la Renaissance. Le thème des relations père-fils aurait pu être mieux exploité qu'au travers des Sacredo ou du prince excentrique – seul excentrique du récit et là aussi c'est bien dommage – qu'on découvre dans le dernier quart de l'ouvrage. Une lecture agréable, dépaysante, mais sans l'exaltation qu'on pourrait s'attendre à y trouver. De la cape et peu d'épée : sans panache donc.