Version Originale. Dans Thinner, Stephen King séduit grâce à une intrigue originale immédiatement accrocheuse à laquelle il est facile de s'identifier. L'effet est d'autant plus important que l'auteur possède la faculté d'insuffler beaucoup de réalisme à ses œuvres. Le travail effectué sur les lieux, les personnages ou les détails floute la frontière entre fiction et biographie. Contrairement à ce que j'avais écris pour la critique de Gerald's Game, le style littéraire est ici plus consensuel et révèle un peu mieux les capacités de l'écrivain. Même dissimulé derrière le pseudonyme de Richard Bachman, la force d'écriture de King se reconnaît aisément : Le lecteur est happé et dévore les pages quatre à quatre, désireux de connaître la suite.
Encore une fois, King livre un roman emprunt de nombreuses interprétations psychologiques — quoique celles-ci soient plus implicites que dans Gerald's Game — et fait douter le lecteur sur ce que l'histoire tente de découvrir : Voyage intérieur d'un homme rongé par la culpabilité ? Cas médical unique ? Influence surnaturelle d'un vieil homme mystérieux ? Et si c'était un peu des trois ? La descente aux enfers du héros est bien retranscrite et le doute habilement amené. Il s'agit d'ailleurs de la meilleure partie du roman, celle où l'on ne sait plus sur quel pied danser et l'on ne sait si Billy devient paranoïaque ou simplement lucide.
La conclusion de Thinner ne déçoit pas, au contraire. Elle surprend et suscite le petit frisson qui caractérise les meilleurs histoires fantastiques. Sans nul doute, King livre là un excellent roman qui à maintes reprises m'a rappellé les meilleurs moments de The Twilight Zone ou The Outer Limits. Un seul point est à soulever en spoiler, avis à ceux qui n'ont pas lu le livre.
En effet, on peut s'étonner de voir le personnage principal choisir d'offrir la fameuse tourte à sa propre femme. Bien sûr celle-ci ne s'est pas montrée très compréhensive et a tenté de le faire interner. Mais Billy le dit lui-même tout au long du roman, il aime sa femme malgré la part de culpabilité qu'elle porte dans l'accident d'où tout découle. Le choix ne lui semble pas particulièrement cornélien non plus, mais peut-être est-ce du à l'influence hypnotique de Lemke, talent que Billy semble déceler chez lui lorsqu'il le rencontre pour la première fois. Le choix est également psychologique, l'amincissement de Billy est en effet à mettre en parallèle d'un besoin de liquider le superflu, les poids lourds et encombrants de sa petite vie bourgeoise qui le dégoûte.