« La Pesanteur et la Grâce », quel merveilleux titre pour ce recueil de pensées de Simone Weil !
Edité pour la première fois chez Plon en 1947, son titre est joli, sa compréhension moins aisée. Il en faut, des pages et des pages pour cerner ces deux notions de Pesanteur et Grâce. D’autant que cette publication est posthume. Simone Weil, décédée en 1943, a laissé derrière elle une série de notes, de réflexions consignées dans un carnet sans mise en œuvre littéraire, sans structuration permettant une argumentation de la pensée.
Et c’est, à mes yeux, ce qui en fait la richesse. D’abord, on se sent autorisé à ne pas tout comprendre. Que cela est confortable ! En même temps, on se sent autorisé à revenir au texte pour le réfléchir, l’apprivoiser, le méditer … et là, encore, à ne pas nécessairement tout comprendre et tout maîtriser. Voilà bien une approche, loin de l’immédiateté, qui devrait interpeller notre temps, celui de ceux qui nous ont précédés, celui des suivants. Une interpellation du temps universel !
Un peu à la manière des peintres pointillistes dont chaque coup de pinceau n’est en soi guère significatif, c'est l’ensemble qui offre une image assez nette de la pensée de l’auteur. Ce livre est, plus que probablement, une bonne introduction à l’œuvre entière de Simone WEIL, à la cohérence et l’effacement de sa vie, à la profondeur de ses réflexions et à son humilité. Elle participa activement à bien des combats, sous des bannières tellement opposées, mais sans jamais faire allégeance aux doctrines des extrêmes. Par ses réflexions consignées sans artifices dans ses carnets et sa manière de se mettre toujours du côté de l’être en souffrance, elle nous invite à un chemin de vie, à un absolu.
Peu importe que nous y arrivions ou non … Prendre le chemin de la rigueur, de la réflexion, de la recherche de la Grâce en pleine connaissance de la Pesanteur, voilà la route !