Difficile de noter la première partie de ce deuxième volume en le séparant de sa deuxième partie. En effet, si la publication française a décidé de diviser en deux ce deuxième volume, il ne représente qu'un seul et même tome à l'origine. Et cela se sent !
Le premier volume consacré à la première journée a été tout simplement l'une des meilleures sorties de ces dernières années dans le genre de la fantasy ! Il est même la révélation 2009 du tueur de roi ! Le style nous immergeait parfaitement dans la vie et l'univers de son héros ! La barre était donc placée très haute ! Après quatre ans d'attente pour la suite, celle-ci était donc exacerbée !
La division en deux tomes du second volume fut donc décevante ! Et pour cause, la première partie nous fait quitter l'univers dans lequel on s'était pleinement immergé, celui de la magie et de l'université ! Les amitiés, les inimitiés, les amours qui se nouaient, et nous passionnaient déjà ! On se sent moins proche du héros, de ses sentiments, plongé dans de nouvelles intrigues, dans une nouvelle cour. Il rencontre de nouveaux personnages avec qui il n'a pas encore eu le temps de s'attacher, et logiquement nous non plus.
L'implication émotionnelle n'est donc plus la même ! Ce deuxième tome semble donc mériter un petit 7/20 à priori, un roman pas désagréable à lire grâce au talent de conteur et à cette très belle narration à la première personne maîtrisée de bout en bout.
Mais il suffit de lire la deuxième partie du volume,et alors de le considérer comme une unité, ce qu'il est en réalité, pour apprécier le talent de son écrivain. Ce deuxième volume rompt avec un premier mouvement amorcé dans le premier tome mêlant à la fois les romans sociaux et les romans d'analyse, un chef d'oeuvre de roman d'apprentissage ! La rupture est là, peut-être un peu trop brutale. Le génie du héros, sa capacité à assimiler tous les savoirs qui l'entourent ne se font plus autant ressentir et on l'admire un peu moins. Mais c'est pour mieux nous plonger dans une aventure épique qui renoue avec les vieux romans de chevalerie. Ceux des romans pastoraux et picaresques : une grande péripétie en toile de fond avance à coup de petites péripéties qui ressemblent de plus en plus aux légendes des héros d'antan. Le talent de l'écrivain est de réussir à moderniser ces intrigues qui se multiplient et qui perdent bien souvent les lecteurs des romans modernes depuis le 19ème siècle. Mais la modernité de sa narration à la première personne, la proximité qu'il fait naître entre le lecteur et le héros et les implications des intrigues quant à l'histoire principale du héros, réussissent à nous embarquer finalement dans cette épopée à l'ancienne !
Quel talent et surtout quelle audace ! Pari réussi ! Pari risqué malgré tout. Ce changement de rythme décevra probablement certains lecteurs, tout comme la magie qui n'est plus au premier plan. Moi-même d'ailleurs j'avoue avoir plus de goût pour la modernité plus traditionnelle et parfaitement maîtrisée du premier tome. Mais le style si particulier de l'auteur, merveilleux conteur, et l'intrigue de fond toujours aussi captivante suffisent à capter le lecteur jusqu'à une fin qui semble nous ramener à une ambiance comme on l'aime !
On attend alors avec impatience un troisième volume qui devrait normalement savoir concilier de manière spectaculaire les qualités des premiers volumes !
Il faut encore et encore conseiller aux lecteurs déçus qui pourraient être tentés de s'arrêter à la première partie de ce deuxième volume, de continuer ! Ils ne pourront apprécier le pari de l'auteur qu'à la fin de ce dernier tome paru en France, ils ne retrouveront peut-être pas ce qu'ils avaient tant aimé, mais ils auront alors l'occasion d'apprécier le talent de Patrick Rothfuss !