Publié sous forme de feuilletons entre 1935 et 1939 dans le quotidien japonais Asahi Shimbun, Musashi se compose de sept livres, relatant le parcours romancé du sabreur Miyamoto Musashi. En France, la saga a été compilée en deux tomes, La pierre et le sabre suivie de La parfaite lumière.
Long de plus de 800 pages, ce premier volet s'attarde sur les premières années de l'apprentissage d'un certain Takezo qui, de jeune chien fou, apprendra à canaliser sa rage et prendra le nom de Musashi, parcourant le Japon du XVIIème siècle afin de parfaire son art, défiant les guerriers les plus talentueux. Une quête spirituelle semée d'embûches, où notre personnage apprendra que la voie du samouraï n'est pas si aisée à atteindre et que l'épanouissement n'est pas toujours là où on le pense.
Tant romanesque par sa longueur et la multitude de personnages qu'il développe qu'intimiste dans son récit initiatique, La pierre et le sabre est un premier volet passionnant, certes exigeant et pas toujours simple à suivre pour qui ne sera pas familier avec les noms japonais, mais qui se montre étonnamment contemporain malgré l'époque qu'il dépeint. Loin de toute naphtaline, Eiji Yoshikawa nous entraîne dans un Japon inconstant gangréné par la violence et l'ambition, ne nous cachant absolument rien des horreurs d'un quotidien incertain.
Dans un style simple mais efficace, jamais pesant, l'auteur parvient à faire de la quête de son héros celle du lecteur, citant divers philosophes et poètes de l'époque tout autant que L'art de la guerre afin d'étayer son propos et nous accompagner dans la recherche d'une certaine paix intérieure. Si l'on en excepte un ou deux (la vieille acariâtre, insupportable de bout en bout), les protagonistes de l'histoire sont attachants et bénéficient chacun d'une écriture soignée, évitant soigneusement de tomber dans le manichéisme. Mieux, l'auteur prend soin de décrire la dualité et les angoisses d'un héros loin d'être irréprochable, semant malgré le chaos et la désolation partout où il passe.
Voyage au pays du soleil levant traversé de soudains éclairs de violence (les combats font très mal), La pierre et le sabre est la première partie plus que prometteuse d'une saga extrêmement populaire dans son pays, une évocation bien entendu romancée d'une figure fascinante du folklore japonais. Il me tarde de lire la suite.