Mieux que les fades 50 nuances de grey
« Cette pensée était de l’alcool pur. » (ma citation préférée à mon avis, celle qui m’a révélée de façon frappante toute la force envoûtante de ce livre, je les ai vu devenir réalité ces mots, ou en tout cas, j’ai soudainement eu envie de leur donner vie)
Witold redonne tout son charme à la pensée, en la faisant danser, elle est idyllique, elle ondule, elle est sensuelle. Dans ce livre, la pensée est clairement action. Le narrateur s’emporte parfois dans des élans proustiens, il peut être sec aussi. Mais le dérangeant du livre vient précisément de sa pensée à lui, totalement perverse, qui fond les choses et les êtres dans une atmosphère lourde, étrange, érotique. C’est comme s’il les mangeait et les recrachait couverts de sa névrose à lui.
Néanmoins le livre ne se transforme pas en un délire onirique d’un illuminé, car il se fait étrangement réalité, avec ce personnage que l’on ne s’explique pas, Frédéric, qui pense exactement comme le narrateur.
Si le livre est érotique ? pas vraiment, il ne faut pas s’attendre à vivre une orgie, par contre, les personnages fantasment, et leur fantasme est tellement doux, tellement beaux, dans leurs mots à eux, avec la langue de Witold, qu’il pousse forcément au fantasme (à nous de choisir l’objet de notre désir).
C’est ce que je retiens de ce livre, au-delà de l’histoire, de l’action, des traits des personnages, c’est cette force envoutante de l’écriture, qui se fait pensée, qui se fait fantasme. Il faut aussi souligner l’écriture de Witold, derrière son narrateur, qui a un rythme vraiment intéressant. Il n’est pas linéaire, ce qui altère et perturbe notre vision des événements en cours. Ils se dilatent, s’allongent, on passe à d’autres tableaux, avec un détail perçant qui scande la description, sans plus s’en rendre compte, se laissent porter par l’agilité de la langue, tout simplement.