Une vraie épopée. Une plongée en terres sénégalaises coloniales.
De toutes façons, David Diop, c’est un auteur qui sait pas comment faire autrement que de vous emmener voyager avec lui, on l’a vu avec frères d’armes et à nouveau avec la porte du voyage sans retour.
Ici, on remonte le temps, encore.
Un prisme sénégalais, toujours.
Mais cette fois, c’est sur place qu’il nous emmène.
Match retour.
Évidement qu’on va parler du grand E, mais pas de panique, faites confiance à l’auteur qui nous épargne l’évidence que le titre suggère.
Voilà, on en a parlé, passons à autre chose.
Comme dans frères d’armes, son roman précédent, la violence est omniprésente, à cela près qu’ici, elle est en demi teinte. Toute feutrée, elle pèse sur le cœur, et elle hérisse le poil des lecteurs. Ce sont des situations, des termes qui vont vous faire bouillir le sang et tiquer l’oreille, mais boudu que c’est efficace et c’est en partie ce qui lie l’intrigue et tient en haleine.
Ce que David Diop romance ici, c’est l’histoire de Michel, réel botaniste français qui raconte son déplacement professionnel au Sénégal (1749-1753).
Par conséquent, le récit de voyage se veut plutôt technique* et l’auteur a tenu à garder le naturalisme originel.
Dans ce voyage, on rencontre Aglaé, Maram, Orphée et le fantôme d’un passé délicieusement frais pour les lecteurs, mais que Michel a tenté de mettre derrière lui tant bien que mal pour vivre et avancer. Comme on fait tous.
Finalement, j’ai suivi un Michel naïf, qui se heurtera aux réalités d’un passé français teinté de Lumières, d’inconnu, et d’onirisme.
Puis j’ai refermé ce livre, riche de connaître ce passé commun, mais terrifiée de réaliser qu’en faisant « l’effort de vivre », de poursuivre, on met de côté certains souvenirs, on oublie nos sentiments, on les enfouis…
Ces derniers et leurs enseignements ne sont pas seulement perdus à l’échelle d’une vie, ils sont aussi perdus pour les générations à venir.
Ce n'est pas une lecture facile et ce ne sera pas votre bouquin de plage 2022, mais je vous recommande chaudement de relever vos manches et de tenter l’expérience.
Il en vaut vraiment la peine !
*Face à cela, pas de panique, vous êtes libres d’accéder à l’Histoire naturelle du Sénégal (M.Adanson) en libre accès sur internet, qui est en fait le recueil que Michel a écrit pour le boulot. Du coup y’a des cartes, des explications, des descriptions de plantes… c’est utile si vous êtes super curieux. Aussi, je vous encourage à y faire des recherches par mot clefs parce que sinon c’est 600 pages de recherches écrites en vieux français. Accrochez vous.)