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Un américain, blanc ou noir, reste un américain...

J'ai vraiment du mal avec les penseurs noirs américains parce qu'ils sont souvent à côté de la plaque en matière d'anthropologie et d'histoire (même pour l'époque).


En lisant la première partie de ce livre j'ai eu l'impression d'avoir affaire à un Malcolm X bis en la personne de J. Baldwin, d'abord pour sa critique des déterminismes sociaux liés aux ghettos mais aussi pour sa déception vis-à-vis de l'Église chrétienne qui a souvent fait l'exact inverse de ce qu'elle prêchait. Le problème est que, même si Baldwin dit vrai, il ne prend jamais en compte le fait que la religion a souvent servi de prétexte à la colonisation que la pratique de l'esclavage a souvent fait l'objet de débats au sein de la société occidentale de l'époque (ça me parait quand même incroyable que Baldwin n'ait jamais entendu parler d'un Montaigne, l'inconvénient de s'être forgé une culture en dehors du circuit universitaire j'imagine) et enfin que la religion chrétienne a surtout été un élément structurant la société occidentale et qui lui a aussi permis de s'imposer au monde (Baldwin donne l'exemple de prêtres italiens qui haranguaient des soldats allant se battre contre des éthiopiens "sans défense", mais c'était là qu' une bête façon de galvaniser les troupes... et les éthiopiens faisaient sans doute la même chose, en priant le même Dieu....).


La deuxième partie commence tout de même bien mieux que la deuxième n'a fini car Baldwin a eu l'intelligence, contrairement à X, de ne pas tomber dans le piège de la conversion à l'islam sous prétexte qu'Allah serait noir (qu'est ce qu'on s'en fout de la couleur de peau de Dieu... son message est censé être universel...). Et je ne peut qu'être d'accord avec l'appel à l'unité derrière le drapeau américain (il rejette par exemple l'idée d'un séparatisme noir), à la modération et à l'acceptation de son passé (il est en encore une fois plus intelligent que X en acceptant de garder son nom d'ancien esclave)que Baldwin lance aussi bien aux noirs qu'aux blancs.


Cependant la conclusion de son livre est, à mon avis, totalement biaisée. Baldwin explique qu'en gros les blancs sont faibles et qu'ils craignent tellement la fin de leur monde qu'ils projettent leur peur sur les noirs demandant la liberté. Sauf qu'à l'époque la majorité des blancs n'étaient pas racistes, ils en avaient juste rien à faire des noirs, minorité qu'ils ne côtoyaient jamais (Baldwin les dénonce sous le noms "d'indifférents"). Aussi, je pense que les blancs avaient plus peur que ce soient les communistes qui mettent fin à leur monde.


Au final, on est devant un livre bien écrit, formulant des demandes sociales légitimes mais qui irrite car il amalgame les États-Unis au monde occidental dans son entièreté ; qui oserait venir dire que, bien que les deux pays aient pratiqué l'esclavage, la France et l'esprit universel des Lumières ont quelconque rapport avec les EU, sa conception raciale de la société et son "rêve américain"... Baldwin se contente d'un ton paternaliste agaçant qui consiste à dire "regardez les blancs n'ont jamais su faire que le mal, nous les noirs nous ne sommes pas comme eux et nous allons les éduquer pour faire le bien ensemble" (qu'auraient dit les humanistes, qu'aurait dit Rousseau, qu'aurait dit Hobbes !?!?) et ne remet jamais en cause ce fameux "rêve américain" auquel les noirs doivent être intégrés pour obtenir, un jour peut-être, le pouvoir...


Sauf qu'une intégration des noirs à la société américaine sans une refonte de celle-ci montre qu'elle n'est pas sur le déclin puisque ses rangs gonflent.... Et c'est justement ce qu'il s'est passé puisque aujourd'hui les américanoïdes les plus orthodoxes sont les rappeurs noirs ultras capitalistes. Par conséquent Baldwin se fourvoie lorsqu'il dit que ce ne sera jamais le propre des noirs de se "croire invincible en temps de guerre et parfait en temps de paix" (en bref au dessus des autres) or c'est justement la caractéristique des mouvements actuels d' "empowerement" des noirs qui reprennent des méthodes prétendument blanches et américaines (roman national exacerbé, déclarations à la limite du racisme, etc.).


Le centre de sa critique auraient donc dû être les États-Unis, leur système et leur "rêve américain" et non pas tellement les blancs, Baldwin aurait dû mettre en garde les siens à propos de l'aliénation que crée ce système et tenter de sauver tout le monde, blancs ou noirs...


Ce livre n'est qu'une énième condamnation (légitime, bien-sûr) des conditions de vie des noirs américains qui ne s'attaque pas au cœur du problème et frôle par moments le racisme. Un bon livre d' américanoïde, en somme...

Protect-Sioniste
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Créée

le 9 juin 2021

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