Apprendre à rencontrer

Proposition intéressante et bienvenue qui entre en totale contradiction avec ma mentalité de hustler solitaire, ancrée depuis trop longtemps déjà. L’ouvrage me rappelle surtout que je n’ai pas encore rencontré la bonne personne, celle qui me fera renaître, m'élever et voir la vie différemment. Peut-être ai-je peur de la vraie rencontre, de l'amour, car je m’aime trop pour désirer changer. Si je ressens effectivement un vide à combler au plus profond de moi, la rencontre avec les humains qui m'entourent ne m’intéresse pas assez : ma nature introvertie m'aide à constater les différences entre l'autre et moi : je ne pense pas pareil que lui, n'ai pas le même rapport aux valeurs morales (dignité, empathie, respect). Dès lors, une barrière se dresse avec le monde des autres, qui semble si différent du mien. Dois-je me forcer à sortir dans un bar avec mes amis/collègues (qui pour la plupart, fument des cigarettes et consomment de l'alcool au quotidien) dans le but de créer une semblant de conversation fade pendant laquelle personne ne s'écoute vraiment ?

Je ressens l’altérité plutôt comme une boussole, qui m’aide à me situer, connaître ma valeur et progresser. Savoir où j’en suis et qui je suis. Car si le livre m'a confirmé dans une idée, c'est que seule l’altérité permet de savoir ce que je vaux, qui je suis réellement. J’attends de réellement rencontrer quelqu’un, au sens définit dans le livre : « j’ai rencontré quelqu’un qui m’a surpris, qui a déjoué mes attentes, et cela me plaît ». Oui, je comprends qu'il faille sortir de (chez) soi afin de rencontrer les autres pour enfin se rencontrer soi-même; mais j'ai l'impression de ne jamais ressentir, en rencontrant quelqu'un, cette impression de repartir ou de revivre.

J'aimerais pouvoir vivre ce qui est décrit dans le livre : une rencontre qui donne l'impression de renaître, qui d'un coup intensifie notre vie, qui nous révèle à nous-mêmes. D'un autre côté, je suis sûrement trop naïf en idéalisant la rencontre parfaite, en esperant que le personne qui va changer ma vie va me tomber dessus par magie.

La deuxième partie du livre "Les conditions de la rencontre" est la seule qui m'a réellement emballée : l'ouvrage brille par une approche plus concrète et pragmatique dans les situations qu'il illustre, sans se perdre dans des exemples futiles ou tirés par les cheveux. Le reste du propos n'est qu'une suite d'analyses théoriques de pensées philosophiques abstraites (la phénoménologie d'Hegel ou l'existentialisme de Kierkegaard sont des concepts lointains pour moi), entremêlés d'exemples de relations historiques (Picasso et Eluard, David Bowie et Lou Reed, Voltaire et Emilie de Châtelet) souvent trop longs et jamais très pertinents. Les références sont trop nombreuses et trop scolaires, ce qui a rendu ma lecture assez indigeste et m'a forcé à lire certains passages en diagonale, tant je me sentais détaché du propos que l'auteur essayait de détailler.

Le livre présente donc la rencontre par ses meilleurs aspects : de la rencontre de l'autre, il y a une découverte de soi, une redécouverte du monde. Si à la fin de ma lecture, je n'ai pas complètement adopté cet optimise vis-à-vis de la rencontre (par ma nature et mes expériences, je n'ai jamais l'impression qu'une rencontre intensifie ma vie), je retiens néanmoins qu'il faut s'ouvir et s'essayer aux autres, en voyant la rencontre comme un processus évolutif permettant de nous révéler à nous-mêmes et de nous élever vers le meilleur de nous.