Un tueur à gages (mais pour la bonne cause, attention) qui prend sous son aile une gamine ultra intelligente, avec toute une bande de vilains à leurs trousses, c'est Léon ça, non ? D'ailleurs j'apprends sur SC que cette Sirène rouge a été adaptée au cinéma par un "homme de l'écurie Besson"...


Ce qu'on demande à un thriller c'est de thriller et de ce point de vue ce roman remplit assez bien le contrat. Un peu trop long : la description des routes empruntées ne passionnera que les fins connaisseurs de la région sud Portugal-Espagne ; et les apartés sur la guerre dans les Balkans font un peu plaqués sur l'intrigue principale, comme pour donner absolument une épaisseur politique au roman.


Comme souvent avec les polars ou les thrillers, c'est lorsque l'auteur veut faire littéraire que les choses se gâtent un peu. Ne soyons pas trop méchants, c'est parfois bien écrit, mais Dantec multiplie vraiment trop les métaphores : on n'est pas vraiment là pour ça, et pas mal d'entre elles sont assez "bateau", le qualificatif s'impose ici. Exemple, page 564 :



La nuit était d'un noir d'encre et les embruns fouettaient leurs visages.



D'autres frisent le ridicule. Exemple, page 531 :



La porte commença à se relever, les obligeant à se repousser. Elle bascula vers le haut pour se ranger contre le plafond, lentement, dans un strip-tease mécanique.



Un strip-tease mécanique, pour une porte de hangar qui remonte ?!


Les personnages sont assez clichés : la machiavélique mère, le bel aventurier, la fliquesse courageuse et obstinée (et craquante, forcément), la bande de marlous cruels... Rien de bien original. Un zeste de gore aussi, avec les snuf movies et de l'hémoglobine à gogo (c'est le rouge de la sirène).


Et puis l'intrigue manque un peu de surprises. Je m'attendais à quelque chose sur l'identité de Travis par exemple, la présence d'une sirène rouge dans l'un de ses tableaux le laissait augurer. Finalement non, on s'en tient à une course-poursuites avec mitraillage à tout-va. Et puis les relations entre les personnages ne sont pas crédibles : Hugo qui s'attache à Alice, on ne comprend pas vraiment pourquoi puisqu'ils ne se parlent quasiment pas (pas plus d'ailleurs qu'on ne comprend ce qui le pousse à prendre autant de risques pour une fillette) ; Eva, la mère, qui veut récupérer absolument sa fille, pourquoi au juste ? Car elle ne déborde pas d'amour maternel...


On pouvait mettre au moins à l'actif de ce thriller qu'il ne cochait pas la case "histoire d'amour". Et puis paf, sur la fin, Dantec craque, comme nos deux héros... Pfff. Au moins nous épargne-t-il la scène érotique.


Le roman, comme c'est de plus en plus le cas aujourd'hui, semble avoir été écrit en vue d'une adaptation cinéma. Catégorie "blockbuster" hélas. Pas honteux, pas marquant non plus. Etiage plutôt bas dans le genre. Je termine par une superbe citation, page 375 :



Seules les cassettes qu'il enfournait régulièrement dans le lecteur troublaient le silence.



S'il en enfournait régulièrement, il ne devait guère y avoir de silence !

Jduvi
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le 20 mai 2021

Critique lue 99 fois

Jduvi

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