Je suis choquée. Déçue. Dégoûtée. Dépossédée de l'envie de continuer dans la vie.
Je pensais sérieusement que La Terre serait une lecture facile, bucolique, presque barbante — surtout après avoir lu la quadrilogie des "abominations humaines" (La Bête humaine, Nana, L'Oeuvre et Germinal) et l'antépénultième tome, probablement le plus apocalyptique de la série. Je ne pensais pas que le diptyque de Jean Macquart serait aussi monstrueux d'un tome à l'autre.
Je pensais, autrement dit, que "la terre", c'était la pastorale. La Faute de l'Abbé Mouret Reloaded, if you will. Le retour aux cultures, aux systèmes épargnés par la nécrose décadente du Second Empire, tant et si bien décrié par Zola dans tous ses romans parisiens.
Non.
La Terre, c'est la brutalité fondamentale. C'est le pays de loups dont on parle encore dans La Bête humaine. Ce sont les femmes qui enfantent dans la douleur et les hommes qui tuent dans la violence, c'est la création et la destruction par-delà loi et morale. Ce sont les fils qui brûlent vifs leurs pères cacochymes et les mères qui empalent les enfants alors qu'ils sont encore dans l'utérus. C'est le commencement du monde et la fin de tout.
La Terre, c'est un des romans les plus intenses que j'ai pu lire jusqu'ici. Je pensais qu'A Little Life d'Yanagihara était mon vaccin contre toutes les littératures traumatisantes, mais c'était sous-estimer Zola que de penser qu'il ne réitérerait le choc viscéral de La Débâcle avec aucun roman.
Le problème c'est que je ne sais plus quoi faire de ma vie, maintenant que j'ai été confrontée aux bas-fonds de l'espèce humaine. C'est épuisant.