Après un premier tome fabuleux, Pullman nous entraîne dans la suite de son univers avec un second tome purement fantastique ! Toujours muni de sa plume si efficace et formidable, un réel délice à la lecture, il développe son univers : on ajoute des personnages, on dispose les pions pour la suite, on crée de nouveaux mondes, on découvre de nouveaux éléments qui viennent enrichir une mythologie déjà bien chargée. Toujours avec des détails disséminés avec soin et pourtant sans alourdir le texte. Si on est captivé par le premier tome, on dévore ce second tome pour en savoir plus sur les aventures de Will et Lyra.
Car la force indéniable de ce second tome, c’est bien sûr l’ajout de Will. Non seulement il vient tempérer Lyra, mais il sert surtout de boussole directrice à l’héroïne en plein doute. Cependant, au-delà de cet apport primordial au récit, Will va aussi servir à introduire notre propre monde à l’univers de Pullman et permettre donc aux deux de cohabiter. Ainsi, si la science avait déjà une place importante dans le premier tome, consistant un membre important du trio formé avec la magie et la religion, ce second tome apporte le rationaliste. Autrement dit, l’élément merveilleux de fantasy, la Poussière, va passer au crible de notre science et trouver une explication qui s’ancre dans le rationnel, presque la science-fiction pure, tout en ayant toujours cette part de surnaturel.
De plus, Pullman commence à poser les bases de sa trilogie et de sa conclusion. Car si le premier tome servait à nous introduire à son formidable univers, le second tome le développe mais y apporte aussi de nouveaux détails qui commencent à ouvrir le voile sur la mécanique globale. La mythologie s’étend, s’étoffe, prend une plus grande dimension. Et si le Magisterium, Mme Coulter ou même Lord Asriel se fond plus rares, voire absent, Will et Lyra seront toujours au centre d’une aventure plus vaste et aux conséquences plus retentissantes. Ajoutons la quête du père perdu et son dénouement qui remet tout en question, l’utilisation toujours aussi efficace du tragique par Pullman, la redistribution des cartes quant aux pouvoirs en place, et on se retrouve avec une intrigue riche, passionnante qui permet à la saga de grandir, d’exploiter son potentiel et de se renforcer.
Je pense notamment à l’utilisation de nouveaux points de vue en dehors de celui de Lyra, qui ouvrent de nouvelle voie et permet l’introduction de nouveaux personnages ou de développer d’autres plus anciens. Les péripétie de Lee Scoresby ou de Serafina Pekkala et des autres sorcières donnent une plus grande dimension à l’œuvre, lui donnant un souffle encore plus épique, puisqu’on se retrouve avec plusieurs fils rouges qui finissent par se rejoindre. L’arrivée de Mary Malone pour le côté rationnel, la cité de Cittàgazze et des Spectres pour leur dynamique au sein de l’univers, la découverte du Poignard subtil qui se révèle être un artefact tout aussi puissant et dangereux que l’aléthiomètre, tous sont autant de nouveaux éléments qui participent à rendre ce second tome encore plus fascinant que le premier et à transformer un univers original et intéressant en quelque chose de sensationnel.
Le tout sous la plume toujours aussi pertinente et efficace de Pullman. On le ressentait déjà avec le précédent tome, mais une fois de plus, il excelle à raconter son histoire. Que ce soit le dosage du rythme et de la tension (le chapitre avec Serafina sur le bateau par exemple), la façon dont tous les fils rouges se développent et finissent par se rejoindre au bon moment, l’absence de réel longueur même lors des passages plus descriptifs, la justesse des dialogues qui ne sont jamais superflus… Au-delà même de l’intrigue elle-même, tout cela constitue une des raisons pour lesquelles j’ai dévoré ce deuxième tome. Au-delà même de l’univers si bien conçu, c’est cette plume qui m’y fait plonger et qui me fait rêver à chaque page.
La Tour des anges n’est pas qu’un très bon second tome d’une bonne saga. Il est l’exemple-type de ce que devrait être le second acte d’une trilogie, ce qui en fait un excellent livre au sein de son propre univers mais aussi à part entière. Une référence.