Difficile de résumer ce roman, d'une grande richesse, alors que l'intrigue, somme toute, en est simple : un homme, Youssef, revient à Salé, sa ville natale, pour vendre l'appartement de sa mère, décédée il y a plusieurs années. A cette occasion, il se plonge dans ses souvenirs d'enfance, dans lesquels souffrance et joie se mêlent intimement.
Le Bastion des larmes est un roman fort et contrasté. Il évoque la terrible condition des homosexuels au Maroc, moqués, agressés, y compris par leur propre famille. Les six sœurs de Youssef sont des personnages terrifiants : après le mariage, ce sont des "mères, des esclaves, des prisonnières." (p. 150) Avant, elles soufflent le chaud et le froid, crient, tempêtent. Le roman est un chœur de voix multiples : à Youssef répondent les six sœurs, son jeune frère, qui a choisi de rompre avec sa famille, Najib, son amant de jeunesse, Khalid, le policier. Chaque voix s'élève et se mêle aux autres pour se rejoindre dans un chant doux, triste, et résigné, qui trouve sont point final dans le bastion des larmes, un lieu chargé d'histoire dont on saisit toute l'importance à la fin du roman.