Luc Dietrich, né Raoul, connait une enfance difficile, il est placé chez son oncle et sa tante suite à l'hospitalisation de sa mère qui a tenté de se suicider. Il est traité comme un fardeau, l'homme est fasciné par les postérieurs masculins et se fâche d'un rien, mais semble avoir de l'affection pour l'enfant. Son épouse, elle ne dissimule même pas son antipathie envers lui. Une nuit, l'oncle Gustave rentre dans le lit de son neveu sous prétexte de calmer un cauchemar, ce dernier se défend et le griffe au visage. Le lendemain, il a droit à un repas délicieux et on lui annonce doucereusement qu'il va aller rejoindre les enfants de son âge en pension, lui qui n'avait pas eu le droit d'aller à l'école. Un personnage étrange lui rend visite et lui pose des questions, pour paraître gentil il répond qu'il veut devenir curé et qu'il prie sans cesse, on lui diagnostique donc une "manie religieuse". On l'envoya dans un asile d'enfants anormaux dans le Vaucluse. Tondu, et entouré d'enfants qui criaient tremblaient ou étaient déformés, il se sent mis de côté car lui n'a aucune différence à revendiquer. La nuit, on empêche les enfants de rêver en les jetant à bas du lit au moindre mouvement. Il parvient tout de même à se faire un ami, mais est trop jeune pour rentrer dans la bande des durs, menée par Grangeons-le-Grand, une brute qui avait massacré son petit frère quand il avait 5 ans. Après deux ans sans nouvelles, il reçoit la lettre tellement convoitée de sa mère, et part vivre avec elle dans un hôtel parisien, le temps qu'elle trouve un travail dans un village du Nord. L'air de cette nouvelle vie ne sied guère au garçon, il se terre dans leur maison et n'a comme seule distraction que de jouer avec des antiquités, les nouveautés et les enfants l'ennuient. Pour tenter de lui changer les idées, sa mère lui offre deux chatons, qui mourront coup sur coup à cause d'accidents tragiques qui passeront à ses yeux pour du sadisme. Luc développe une culpabilité qui ne va plus le quitter, il se sent un pêcheur né, et va lutter contre ce sentiment tout au long se sa vie.


Ce roman initiatique a été écrit à quatre mains, sous l'influence d'un ami de l'auteur, qui lui a d'ailleurs dédié. Il rencontre Lanza del Vasto en Italie, celui-ci le persuade d'écrire sur sa vie afin de procéder à une catharsis qui le libérerait de ses souffrances. Sur les six-cent pages d'origine la plupart ont été écrit par celui-ci après avoir écouté Dietrich parler. L'éditeur optera pour une coupe assez radicale qui divisera le roman en deux : Le bonheur des tristes étant la première partie, de l'enfance de l'auteur jusqu'au début de son âge adulte.

C'est d'abord une grande histoire d'amour avec sa mère, qui va jusqu'à prendre le pas sur ses rapports avec les autres femmes. Luc est ardent à l'amour, qu'il voit pourtant comme un pêché, sa mère doit être la seule à occuper ses pensées et il rejette toute sollicitation.

Il a un rapport perverti avec la religion, torturé par des péchés imaginaires, il se culpabilise et récite des rosaires jusqu'à l'épuisement, il se dégoûte vite de la vocation ecclésiastique qu'il désirait étant enfant.
C'est un personnage d'un autre âge, laid, mystérieux, qui n'a que faire des plaisirs faciles et des tentations terrestres.
Sa vision de la tristesse est très belle, il la voit comme un état entier qui possède son bonheur en soi, car les gens heureux pour lui sont vains, ne désirent rien.
On assiste avec lui aux hauts et aux bas de sa mère, dont l'âme et perdue malgré les tentatives du garçon pour la sauver.
Luc ne se révolte pas contre le destin injuste qui l'accable, il ne voit d'autre coupable que lui même, il essaye de trouver l'oubli dans les plantes et la poésie.
A vrai dire, ce roman ne se distingue guère des autres écrits du genre, ne serait-ce par sa sobriété. Dietrich est doué pour la métaphore bucolique sans pour autant se perdre dans des considérations philosophiques qui le dépassent.
La coupe de l'éditeur est peut-être un bien et évite les longueurs déprimantes de l'adolescence qu'on trouve beaucoup dans la littérature initiatique. Des passages sont très poétiques comme le chapitre La Guerre des pavots que je recommande. Un bel ouvrage, qui ne révolutionne cependant pas la littérature.
Diothyme
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le 29 mars 2012

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