Une grosse fresque historique comme je les aime le plus souvent, à l'image des Piliers de la Terre de bonne mémoire, qui coche toutes les cases (la petite histoire dans la grande Histoire, les voyages, les peuplades étonnantes, le substrat politique, les épreuves initiatiques, les tourments intimes et j'en passe...) mais qui m'a curieusement lassée au bout d'un moment. On passe d'une époque à l'autre souvent de manière un peu brutale, ou peut-être trop aléatoire, pour se retrouver à un moment signifiant dont la portée s'échine à nous échapper. A moment donné, je me suis dit que je ne faisais que relire la même scène en boucle : les méchants protestants, ivres de pouvoir, s'acharnent à effacer les traces de l'évangélisation des gentils catholiques en terres lapones, au fil des décennies, sans trop y parvenir, et le gentil héros papiste part cartographier et espionner sur place encore et encore, sans pouvoir entraver les desseins maléfiques d'hommes de pouvoir complètement perchés, comme il y en a eu tant. Il vieillit, ses convictions évoluent, et ça, c'est intéressant, mais la situation ne bouge pas d'un pouce : les rennes meurent, les Lapons aussi, ou sont réduits à la misère et à l'esclavage, c'est le lot des doux, tandis que les scélérats prospèrent à coups de mensonges et d'expédients douteux. Le pessimisme de l'ouvrage finit par plomber, d'autant que la Nature est hostile, les geôles lugubres et les scènes de torture éprouvantes. Tous ces défauts pourront sembler autant de qualités à d'autres lecteurs, mais je me suis lassée de ce complot religieux qui entraîne les familles dans des tourments interminables. Oui, voilà, c'était interminable, en fait. La fin ne cessait de reculer et j'ai fini par m'acharner une partie de la nuit pour arriver enfin au bout et passer à autre chose. Non pas que ce livre démérite totalement, mais il s'essouffle en cours de route, dirais-je, et la tension qui monte autour du héros vieillissant finit par provoquer l'effet inverse : une démobilisation difficile à rattraper. Pourtant, la dernière histoire d'amour est originale et bien menée, apportant un petit renouveau à un genre bien trop balisé. Mais ça n'a pas suffi à rattraper les voyages fastidieux et les entrevues caricaturales.