Ayant découvert l’univers de Game of Thrones par la série TV et non par les livres, j’ai abordé les livres comme un complément, ou une alternative peut-être, à la série dont j’ai fini par être fan, j’en ferai de même dans ma critique. Je ne spoilerai pas dans le détail de passages importants, je les sous entendrai tout au plus mais j’en parlerai quand même à demi-mot donc bien sûr si vous voulez une découverte totale, lire cette critique n’est pas recommandée mais j’ai envie de dire que ça vaut pour toute critique dans ce cas-là.
Les intrigues de Port-Réal sont plus détaillées ici et sensiblement différentes. Déjà, Tommen est âgé de seulement 8 ans dans cette version, vomissant en public à la vue d’un cadavre, ce qui change quand même pas mal la perception que je peux avoir du personnage. Le stratagème pour se débarrasser de Mace Tyrell en l’envoyant combattre à Accalmie, Cersei en conflit avec Kevan qui veut suivre les plans de Tywin coûte que coûte, lady Merryweather qui vient apporter un soutien dont on peut douter de la signification... sont autant de sous-intrigues tout à fait sympathiques dont la série fait l’impasse.
Surtout, Cersei vire plus explicitement dans la folie en parlant de raser le donjon rouge pour établir le trône à Castral Roc, en voulant envoyer son oncle Kevan face à Béric Dondarrion, en fantasmant sur comment tuer chaque Tyrell qui croise sa route… La scène où la tour de la Main est mise à feu sous l’ordre de Cersei aurait pu vraiment être puissante dans la série, d’un point de vue visuel bien sûr mais ça aurait pu renforcer le lien entre Cersei et Aerys dans l’esprit de Jaime avec la folie et le jeu gagnant du terrain sous ses yeux impuissants.
D’ailleurs, les aventures de Brienne sont l’occasion d’un petit retour sur l’emprisonnement d’Aerys qui le fit sombrer dans la folie, ce qui est un élément de background assez intéressant. Notre chevalier femme permet également de constater davantage les ravages de la guerre et la misère grandissante avec le plus long temps qui lui est accordé dans ce tome, ce qui met mieux en exergue cette dualité entre les nobles qui jouent au jeu des trônes depuis leurs somptueuses demeures mais ce qui se traduit pour le peuple par la famine, la souffrance.... C’est aussi l’occasion d’introduction subtilement à différentes reprises Randyll Tarly et de différents points de vue, impitoyable, loyal, adepte de l’ordre, conservateur... donc même s’il ne se passe rien d’extraordinaire sur cet arc narratif, il y a tout de même beaucoup de choses intéressantes qui sont amenés grâce à lui.
Par contre, il y a un arc narratif que j’ai trouvé un peu moins réussi, c’est ce qui se passe dans le Val. Le personnage de Nestor Royce corrompu par Littlefinger en flattant son ego avec efficacité là où la série fait directement rentrer en jeu Yohn Royce qui y est impassible ça ne me pose pas tant de soucis, ça serait plutôt Sansa. Sansa est plus passive, moins intelligente et moins charismatique que dans son équivalent dans la série, alors que j’aimais beaucoup ce tournant dans la série, elle commence à manipuler, à jouer double jeu, à laisser planer un doute sur ce qu’elle sait et ses intentions... là c’est pour devenir une grande sœur de substitution à Robin plus présent et pas franchement moins insupportable.
Yara est plus développée avec sa mère pour laquelle elle s’inquiète, son copain d’enfance qui sert à mettre en avant son côté aventureux et décomplexé… « J’ai touché plus d’hommes pour ma part que je n’en saurais dénombrer. D’aucuns avec mes lèvres et nombre d’autres avec ma hache. » Aeron fanatique du dieu noyé est assez captivant et original avec ses principes en comparaison avec Yara et Euron, dommage que ce denier ne soit pas également présenté plus en détails dans ce tome, ça aurait permis de voir les 3 personnalités.
Tout au nord, Jon assume bien son rôle de lord commandant comme lorsqu’il met en avant l’entraînement au tir à l’arc négligé jusqu’alors, ce qui lui confère toujours plus de charisme mais c’est surtout l’intrigue avec Val, la princesse sauvageonne, et son bébé ainsi que celui de Vere qui m’a surpris et comme c’est complètement absent de la série TV, je suis très curieux de voir où l’auteur veut en venir avec ça. En tout cas, les nouvelles responsabilités de Jon s’accompagnent réellement d’un changement de personnalité plus perceptible que dans la série et ce n’est pas pour me déplaire.
Tout ça c’est bien gentil mais on a même pas évoqué ce que j’ai préféré dans ce chaos : Dorne. Les aspics des sables présentées l’une après l’autre, chacune ayant un plan différent pour venger leur père, Doran tout sauf crédule les faisant arrêter avant qu’elles ne fassent quoi que ce soit est déjà un bon point de départ, mais c’est surtout du point de vue de Ser Arryn que ça devient génial. Déjà, il amène le point de vue de la population dornienne et pas seulement des Aspics et de Doran, ce qui est déjà un plus que la série élude.
Surtout, la romance de Ser Aryn avec Arianne Martell complexifie et enrichit énormément les relations politiques et intimes qui participent au jeu des trônes à Dorne. J’adore cette partie dornienne de l’intrigue qui se forme car toutes les factions sont attachantes à mes yeux : une femme qui refuse que son héritage et sa romance soient sacrifiés simplement parce qu’elle est femme, un chevalier tiraillé entre ce que l’honneur, le devoir et son cœur lui dictent, un prince meurtri qui veut la vengeance mais qui craint les conséquences d’une guerre sur son peuple, une fille qui veut venger son père tué par un être abominable jamais sanctionné pour cela…
Si l’on excepte l’intrigue dans le Val, j’ai tout aimé ou adoré dans ce tome qui pourtant ne comprend aucun événement relativement marquant, c’est un développement posé mais très réussi des intrigues en place ou se mettant tout juste en place. C’est un peu le chaos tellement c’est diversifié mais ce n’est pas un problème que j’ai ressenti plus que ça, à voir comment la formule va évoluer par la suite.