Un polar littéraire matiné d'une pointe de SF
Voila comment l'on pourrait présenter le dernier roman de Michael Chabon, talentueux écrivain américain.
La base est un légère distopie : Israël n'existe pas. Après la guerre, les juifs ont trouvé refuge dans le district de Sitka, Alaska. Mais ils n'ont pas eu un état à eux, juste une concession de soixante ans. Et cette concession arrive bientôt à sa fin.
Meyer Landsmann, inspecteur local dont la vie est un échec se prépare donc à assister au nouvel exil des juifs. Mais l'on retrouve dans l'hôtel miteux où il loge le cadavre du fils d'un rabbin très puissant. En voulant enquêter sur la mort de ce junkie, joueur d'échecs, homosexuel et messie en devenir, il va rencontrer de puissante opposition.
Voici donc la trame de cet étrange et inclassable roman. La dominante polar est assez présente dans une ambiance à la Chandler : hôtel minable, inspecteur raté et misanthrope, complot des puissants... et le tout se tient plutôt bien il faut bien le dire.
Le style lui même est un hommage à Chandler et l'auteur a mis au point tout un argot Yiddish qui participe grandement à l'ambiance du livre.
Mais j'ai du mal à cacher une certaine déception. En effet j'avais trouvé spécialement remarquables "Les extraordinaires aventure de Kavalier et Clay" et j'ai trouvé ce roman de Chabon nettement moins génial. L'histoire est dans la veine de celle d'un polar noir des années 50 mais on pourrait justement lui reprocher son classicisme si l'on met de côté la distopie originale. De même pour les personnages, tous très attachants mais parfois un poil caricaturaux.
Mais cela reste un roman très intéressant, au style impeccable et qui comme tous les bons polars transcende le genre. Ceux qui cherchent un excellent polar ou un très bon roman ne seront pas déçus. Mais ceux qui comme moi voudraient retrouver la flamme des "aventures" risquent de rester un peu sur leur faim.
Précisons pour finir que ce roman devrait être porté bientôt à l'écran, les frères Coen en ont acquis les droits (et c'est peu dire que ça devrait coller à leur univers déjanté)