"En remontant dans le passé, ne cherchant que les faits, je l'ai reconstruite [...] Et puisque je lui dois beaucoup, puisque je suis le seul qui connaisse vraiment toute l'histoire, j'ai entrepris la rédaction de ce mémoire."
Le Dahlia Noir se présente d'emblée comme un hommage. L'auteur/narrateur affiche ses intentions. L'intrigue, jusqu'à sa résolution, ne servira qu'à une seule chose : reconstruire, littéralement ce qui a été réduit à néant, le corps du Dahlia Noir, découvert coupé en deux dans un terrain vague. Non pas pour "résoudre", mais pour redonner à cette chair mutilée son statut de femme.
Ne voyez pas dans ce long prologue qu'est le match de boxe du début du livre, un moyen pour Ellroy de noircir des pages blanches. Ce "combat" est celui qui "annonce", comme un mauvais présage, l'horreur qui va suivre, comme pour mieux la retarder. Ce "combat" fait aussi écho au "débat" intérieur qui anime l'auteur/narrateur : lutter avec sa mémoire, affronter ce que l'on aimerait mieux oublier. Et si Ellroy "résout" ce qui ne l'a pas été dans la réalité, ce n'est que parce qu'il veut aller jusqu'au bout de sa "reconstruction", à l'instar de Frankenstein avec son "monstre".
Jamais roman n'aura été aussi loin dans l'introspection. Jamais fait divers n'aura si bien été érigé au rang de mythe. Le Dahlia Noir est le plus bel hommage qu'un homme puisse rendre à celle qui lui a donné la vie. Ce livre est le plus personnel et le plus sincère d'Ellroy. Il redonne tout son sens au mot "œuvre"...Une des plus belles œuvres du vingtième siècle, à mon sens.
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