La figure de Gérard Philipe dans Les Liaisons dangereuses (1959), l’un de ses derniers rôles au cinéma, n’est pas sans rappeler Montgomery Clift amaigri et fatigué dans la dernière année de sa vie. L’un décède brusquement sans connaître son mal avec l’ardeur de vivre, tandis que la star hollywoodienne éloignée des projecteurs lutte fatalement contre ses addictions. À presque dix ans d’écart, leur jeunesse flamboyante et leur talent nouveau prédéterminait à la totale réussite.
Jérôme Garcin retrace les derniers mois de l’acteur français avant que n’arrive malheureusement trop tôt la faucheuse, pour emporter son âme au ciel. Le récit de l’auteur, publié le 03 octobre 2019, sous le titre évocateur Le Dernier Hiver du Cid donne la notion douloureuse du temps qui passe durant la saison hivernale 1959 et l’homme de théâtre habité qu’était Gérard Philipe. Avec pudeur et sensibilité, Jérôme Garcin pénètre discrètement dans l’action de son protagoniste. De sa volonté toutefois linéaire, le recul sur les événements chronologiques est presque distant et l’émotion du lecteur peine à s’approfondir davantage. Sous les mots de son auteur, la dernière image du malade au visage à jamais enfantin, allongé sur le lit conjugal à son retour d’hôpital, hantera pour toujours nos esprits comme si nous y étions. Le regard de sa femme aux yeux noirs complice et forte en apparence, cache la vérité de son cancer du foie foudroyant. Ses proches amis lui rendent visite pendant sa convalescence et jusqu’au bout sans ne rien savoir de l’inévitable qui se rapproche dangereusement.
Gérard Philipe s’éteint le 25 novembre 1959 à Paris, avant de concrétiser ses prochains projets en remontant notamment sur les planches pour y incarner les plus grands personnages de l’histoire de la littérature (Hamlet) et Edmond Dantès à l’écran. Physique, beau, rieur, l’éternel Le Cid laisse une nation orpheline de sa mort prématurée et Jérôme Garcin signe un hommage sincère afin de nourrir notre mémoire.