Le froid est un roman construit en trois actes et un entracte comme une pièce. C’est que Filippov notre héros est metteur en scène de théâtre et de cinéma, il doit prendre l’avion pour sa ville natale, quelque part en Yakoutie, dans le grand nord sibérien où règnent le noir, un froid avoisinant les moins 40 et un épais brouillard occultant et givrant. Filippov doit rencontrer son assistant et récupérer des dessins pour son scénario, c’est l’affaire d’un aller-retour. Cependant La situation dégénère quand la ville tombe en panne de chauffage, la panique s’empare alors des habitants.
Nous découvrons la pratique du « zapoï » notre héros boit, boit… jusqu’à tomber raide, les esprits se brouillent alors, et le récit nous plonge dans la perplexité.
Guelassimov nous guide dans un récit alcoolisé, embrumé, par la vodka vers des situations loufoques, rocambolesques, nous pénétrons dans un « monde borderline » où la frontière entre réel et irréel est floue, on est en quelque sorte en « delirium tremens » !
Nous apprenons que la femme de Filippov l’a quitté et qu’elle est décédée, peu de temps après, dans de troubles circonstances. Filippov est un homme pessimiste et angoissé, se saoule-t-il de chagrin ? A-t-il quelques remords ? Un passé trouble ? Guelassimov nous fait pénétrer dans la conscience de Filipov par le truchement du « diable du vide » son compagnon, guide et conseiller.
Ce récit catastrophe dévoile les travers et comportements de l’âme humaine devant l’adversité. Nous sommes dans la pure tradition russe. Il y a beaucoup de Boulgakov comment ne pas le reconnaître ?
Guelassimov se met à distance des événements et prend un ton ironique, son humour est fin et incisif pour notre plus grand plaisir.
J’ai adoré cette œuvre vive et enlevée et même poétique qui assène de sacrées vérités sur la nature de l’homme et les conditions de vie en Russie.
J’avais beaucoup aimé « la soif », je rajoute « le froid » comme « coup de cœur ».
A lire absolument et auteur à suivre.