Mon premier roman de Cormac McCarthy fût No Country For Old Men. Une claque comme très peu j'en avais pris en lecture. Un remake du bon, la brute et le truand dans un Texas en perdition (sans oublier l'adaptation des frères Cohen plus que réussie). J'ai ensuite découvert La Route au cinéma.
J'ai préféré, au lieu de lire La Route, continuer avec son premier roman, Le Gardien du Verger.
Quelle claque encore. Mais attention le livre est très difficile d'accès, non pas en terme de vocabulaire mais en terme de narration. Non pas que l'histoire soit compliquée, mais le style McCarthy est ce qu'il est... La première partie du roman laisse peu de place aux noms des personnages et on cherche parfois de qui il parle (l'enfant, le vieil homme, l'homme, etc.). Pas facile non plus pour ceux qui n'ont pas lu du McCarthy de découvrir les dialogues des personnages ancrés dans les paragraphes (sans guillements, sans sauts de ligne). C'est brut. Mais je trouve ça génial. Après je vous préviens, il faudra peut-être une deuxième relecture pour saisir certains des paragraphes...
Si je ne vous ai pas rebuté, attaquons le scénario : l'histoire se déroule dans les années 30, un traficant d'alcool, Marion Sylder, tue un homme, un soir, dans un excès de rage.
Il se débarasse du cadavre en l'abandonnant dans un verger. Un vieil homme s'occupera pendant des années de veiller sur ce cadavre souillé.
Quelques années après le meurtre, Sylder, le traficant, se crashe en voiture dans une rivière. Il est sauvé par un gosse qu'il prend petit à petit sous son aile. Il s'avère que l'enfant est le fils de l'homme assassiné par Sylder.
Les questions n'ont pas forcément le temps de nous submerger (Pourquoi le vieil homme veille le cadavre ? Le fils se vengera-t-il quand il apprendra la vérité ?) puisque le véritable personnage principal de ce roman, c'est le fin fond du Tenessee cher à McCarthy.
Les descriptions sont bluffantes de réalisme et chaque mot, chaque détail, respire l'amour de la nature. Les vallons, les rivières, le temps et les saisons qui évoluent mais aussi les actions des hommes dans ce paysage (les longues promenades du vieil homme, les anecdotes du passé, la chasse avec les chiens, etc.).
Tout ceci est bien sûr porté par les policiers qui recherchent Sylder (pour le trafic d'alcool), l'enfant qui a trouvé un second père sans savoir que c'est l'assassin de son véritable père, le vieil homme qui erre, véritable gardien d'un paysage qui lui survivra comme il a survécu aux hommes avant lui. Entre la nature cruelle et souvent incompréhensible des hommes, la beauté d'une région que l'on a l'impression d'avoir toujours connue, on espère quand même avoir des réponses à nos quelques questions.
Il ne faudra pas s'attendre à grand chose. McCarthy, comme toujours, ira là où personne d'autre ne serait allé, nous laissant orphelins et mélancoliques d'un temps que nous ne connaitrons jamais. Mais surtout avides de prendre le premier vol pour Knoxville et découvrir par nous-même la montagne dans laquelle nous avons marchés, par l'esprit, durant 280 pages.
Magnifique.
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