Ce roman traite de l'enfance et de l'adolescence de deux enfants confiés à leur grand mère pendant une guerre afin qu'il grandisse à l'écart de la ville et de ses combats.
Bien qu'aucun nom de pays, qu'aucune date, qu'aucune nation ne soit nommément mentionnée, on comprend à travers les lignes qu'il s'agit de la seconde guerre mondiale, et que l'histoire se déroule dans un pays allié du Reich (sans doute la Hongrie si on se fie à la nationalité de l'auteure et compte tenu de certaines allusions qui rappellent l'histoire de ce pays dans la guerre).
Les deux enfants, livrés à eux-mêmes (car leur grand-mère les déteste) vont alors se construire leur propre univers, froid et cynique, et ainsi trouver seuls les explications au monde qui les entoure et dont ils ne comprennent pas les règles.
On assiste ainsi, petit à petit, à l'émergence de deux monstres qui, dans un monde qui semble dépourvu de repères moraux, vont se bâtir la leur de morale, parfois bien loin des standards que l'on considérerait comme acceptables.
S'endurcissant à grands coups d'exercices physiques et mentaux, les deux frères se départissent de presque toute sensibilité, jusqu'à devenir des êtres froids et calculateurs.
Le tout est bien écrit, dans un style très neutre, parfois naïf (on l'oublie parfois, mais on suit l'histoire d'enfants) qui reflètent à la perfection la mentalité des deux protagonistes principaux, mélange de candeur enfantine et de cynisme adulte.
Ce roman m'a fortement rappelé une de mes autres lectures, L'oiseau bariolé de Jersy Kosinski, qui prenait aussi pour personnage principal un jeune enfant livré à lui-même pendant la guerre. Les deux romans brillent par leur écriture volontairement apathique, et par l'accent mis sur des enfants dépassés par les événements et perdu dans la tourmente de l'Histoire.
Moins brutal que l'Oiseau bariolé, Le grand cahier n'en est pas moins dérangeant, ces deux héros étant pour le moins amoraux, et effrayant de cynisme.