J'en avais tellement entendu parler (ou plutôt "vu écrit") que, forcément, j'ai commencé à avoir des attentes démesurées. En général c'est pas bon, ça... Arthur Machen, celui qui soulevait le coeur de certains de ses contemporains avec des romans qualifiés de "dégénérés"... Machen, qui a su inspirer les plus grands écrivains de fantastique avec une horreur suggérée, instillée comme un suc mortel qui vient se loger dans les recoins les plus oubliés de votre cerveau...
Le Grand Dieu Pan est parfois considéré comme son chef-d'oeuvre et, il faut dire, le speech avait de quoi me séduire avec son évocation d'un autre monde mystique superposé au nôtre, et son grand dieu païen assimilé à Satan. Il y a tout cela dans le roman, mais c'est peut-être finalement un peu trop suggéré...
Le livre est très court et la majorité de ses pages se centre sur l'enquête que mènent deux hommes sur une jeune femme. Femme en apparence normale mais en réalité si dépravée qu'elle en arrive à tuer plusieurs hommes...d'horreur ! Oui, dans les vieux bouquins l'horreur rend fou ou tue forcément mais c'est tellement plus amusant que le gore que je ne m'en plains pas.
L'ambiance est donc évidemment mystérieuse à souhait et le style 19ème siècle que j'affectionne particulièrement donne un parfum on ne peut plus dérangeant à l'intrigue (restitué de fort belle manière par la traduction, d'époque elle aussi). Certaines scènes sont saisissantes, mais je ne peux pas me départir de l'idée que Machen aurait pu approfondir son histoire sans dénaturer la vocation de celle-ci. En l'état, j'ai presque l'impression d'avoir lu une première ébauche de quelque chose de plus grand, de quelque chose de vraiment épique. Le monde invisible de Pan demeure un mystère aux innombrables possibilités avortées...