Publié sur L'homme qui lit :
Il y a deux ans, un auteur inconnu du grand public – dont plusieurs nouvelles avaient été pourtant primées auparavant – faisait sa grande arrivée médiatique avec un livre dont à peu près tout le monde a parlé, sauf peut-être les cercles les plus intellectuels, dont les lectures doivent demeurer les plus en hauteur possible vis-à-vis des lectures populaires.
Le liseur du 6h27, c’est Guylain Vignolles, un tueur de masse : chaque matin, il grimpe dans un wagon bien précis du même RER, afin de se rendre comme des centaines de milliers de franciliens, à son travail. Et quel travail ! Guylain est un ouvrier qualifié qui a tout pour être détesté des lecteurs : il s’assure qu’une énorme machine outil au nom barbare déchiquette les livres qu’on lui fournit par tonnes afin qu’elle les détruise et les transforme en produit brut.
Pourtant, dans ce massacre quotidien, quelques feuilles échappent aux impitoyables broyeuses et c’est notre héros abhorré qui au nez et à la barbe de son odieux responsable d’atelier les sauve d’une mort annoncée, en les cachant dans sa blouse… afin de les lire le lendemain dans le RER du 6h27.
Ce rendez-vous quotidien dans le wagon de Guylain a ses adeptes, et lorsqu’il saisit les précieux feuillets épargnés, le silence se fait toujours. Les fans en réclament, et Guylain est même convié dans une maison de retraite pour faire profiter ceux qui ne peuvent se déplacer de ses intrigantes lectures.
Jean-Paul Didierlaurent, l’homme aux quatre prénoms, nous offre un roman d’une douceur enchantante, de ceux que l’on lit facilement et qui laissent un discret sourire de la première à la dernière page. Un roman solaire qui réconcilie avec l’humanité, comme Gavalda ou Constantine savent le faire avec brio, et que je ne peux que conseiller.