Robert Silverberg est sans conteste un ovni dans le monde de la science-fiction. Nouvelliste et romancier né en 1935 à New York, il devient extrêmement prolifique dans les années 50 avec pas moins de 200 nouvelles et essais.
Si il est passé maître dans l'art pour écrire des histoires de science-fiction, on lui connaît également des ouvrages à caractère historique, archéologique et même érotique (Les Monades urbaines).
A partir des années 70 dans un contexte d'émancipation et de liberté, il revient à une écriture plus introspective et dramatique mais toujours teintée de fantastique avec certains de ses plus grands chefs-d'oeuvre : L'homme dans le labyrinthe, L'oreille interne, Les ailes de la nuit, Le Livre des crânes.
Robert Silverberg nous livre, dans son roman Le Livre des crânes, un road-trip philosophique de quatre étudiants afin de parvenir à la source de l'immortalité. En effet, l'un d'entre eux, Eli, a découvert un mystérieux manuscrit prouvant l'existence de l'immortalité physique. Ce livre fait l'état d'une Fraternité des Crânes située dans un monastère au Nouveau-Mexique. Mais la vie éternelle a un coût et la quatuor devra passer par l'Epreuve pour mériter sa place dans l'éternité.
Nous vivons les aventures de ces quatre jeunes issus de milieux sociaux diamétralement opposés par le biais de réflexions personnelles de chacun des protagonistes. Chaque chapitre est structuré sous une forme intimiste où les personnages nous délivrent à tour de rôle leurs états d'âmes quant à leur périple spirituel. Ce procédé narratif est indispensable pour une meilleure compréhension de la psychologie des personnages et nous permet d'être immédiatement investi dans la lecture. Cependant, certaines réflexions existentielles se tirent en longueur et nous font perdre le fil de nos propres pensées.
Robert Silverberg est malin et distille à travers les paragraphes des contradictions qui nous font douter de ce que nous avions pu croire jusqu'alors. La traversée des Etats-Unis en voiture nous offre un panorama d'une Amérique sauvage avec ses paysages vierges et désertiques.
Les dialogues sont presque inexistants et ne sont présents que pour faire interagir nos quatre compères durant leur voyage initiatique.
Le style est tantôt soutenu tantôt vulgaire car les personnalités sont très différentes les unes des autres et témoigne d'une grande variété dans l'écriture de Silverberg.
Ce livre peut paraître lourd et rébarbatif si l'on ne s'intéresse pas un minimum aux questions philosophiques et au mysticisme. L'auteur a truffé son roman de références à des cultes anciens donc autant s'accrocher à ce niveau là. Le livre est également très porté sur la question de la sexualité et s'appuie plus précisément sur l'homosexualité masculine par l'intermédiaire de deux personnages.
Malgré quelques extrapolations philosophiques et un début « tire la rallonge », Le Livre des crânes est un excellent moyen pour approfondir sa part de mysticité.