J’ai vraiment apprécié le début, le phare, l’idée de commencer par la pluie (même si c’est un peu mettre en scène un topos pour le légitimer ; mais l’effort et la subtilité aident à le faire bien passer). Après, je trouve que le récit pèche par son manque de structure. Un scénario ouvert, ça ne me dérange pas, j’aime même. Enfin, un type qui marche dans Dublin ou qui raconte ses vacances à la mer en Normandie, ça n’est pas non plus en apparence très construit. Chez Moyano, je n’ai pas trouvé d’architecture secrète. C’est écrit au fil de la plume ou plutôt au fil de l’eau mais sans que j’aie jamais eu l’intuition d’une cohésion des scènes et des souvenirs. Le style en lui-même, après l’embarquement, n’est pas si incroyable et on lui repère vite des défauts : le lyrisme n’est pas si soigné, les jolis sentiments qui nappent la description du « petit bateau » m’ont lassé ; même les références m’ont semblé peu à peu plus grossières : alors que j’aimais les oiseaux de Lugones (que je n’ai pas lu ; mais je trouvais belle la façon de les amener), l’évocation de Verlaine au moment où il commence à pleuvoir (début du chapitre XII) est bien cliché et rien ne la sauve.

Donc, la longue partie qui se déroule en mer m’a laissé dubitatif. Je trouve que Moyano n’a pas su donner un sens commun aux souvenirs, aux anecdotes, aux histoires inventées. La fin m’a plus convaincu, notamment le fait qu’il juge son journal de bord inutile, inefficace, puisqu’un descendant n’aurait rien de tangible auquel se raccrocher : souvenirs, descriptions poétiques et histoires ne relevant pas de l’informatif. Pourtant il n’y a en fait rien de plus instructif que ces pages écrites sans souci informatif, elles apparaissent finalement comme une bien meilleure matière pour reconstituer le passé. Et de bonnes dernières pages ; la guitare fait écho au violon, et puis ce « grand cheval blanc » de Contardi…

Avis en demi-teinte, donc ; ce qui ne m’a pas séduit c’est l’écriture au fil de l’eau, qui fait trop ressortir à mon gout les défauts de construction et les facilités de style. Bref, une lecture pas incontournable, mais plaisante et dont il est certain qu’il (me) restera quelque chose.
Rasp
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le 17 janv. 2013

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