En Octobre 2020 sortait cette nouvelle traduction du Maître et Marguerite, chef d’œuvre de Mikhaïl Boulgakov, et plus généralement de la littérature russe du XXe siècle, avec les traducteurs - qualifiés par Le Monde de « virtuoses », tout de même - André Markowicz - qui su rendre à Dostoievski et à Pouchkine leur force d’origine - et Françoise Morvan.
Le roman, écrit par Mikhaïl Boulgakov entre 1929 et 1940, nous plonge dans le Moscou des années 1930, au milieu d’un monde dominé par le stalinisme - même si jamais il n’est mentionné, tout est en métaphores et en symboles - où les artistes n’ont plus la liberté de douter, travaillant pour le régime. C’est alors que le diable - en qui plus personne ne croit, l’athéisme est d’État - fait son apparition, distillant la folie et bouleversant tout du moins ceux qu’il croise. Mais Le Maître et Marguerite est également une formidable histoire d’amour, qui renverse completement les notions de bien et de mal, cassant tous les codes du grand roman russe tel jusqu’alors - c’est dans ces moments là qu’on est heureux des noeuds qu’on se fait au cerveau, c’est un roman complexe mais avant tout vraiment jouissif.
Publiée aux éditions Inclute, la nouvelle traduction diffère de celle - plus ancienne - de Claude Ligny - révisée par Marianne Gourg, chez Robert Laffont - par son vocabulaire plus directe, ses phrases plus hachées et surtout nous retrouvons une véritable virtuosité de la langue dans certains des passages clés du roman - notamment le début du Chapitre 32, commençant par une formule restée célèbre : « Dieux, ô mes dieux ! », ou encore le début du roman - et ces trois premiers chapitres d’anthologie.
Si Le Maître et Marguerite garde tout son aspect - prépondérant - humoristique et satirique à bien des égards - une critique acerbe du régime stalinien où manque un élément essentiel : le doute -, il prend ici une véritable dimension universelle et poignante - la force de l’art émerge des mots de l’auteur - : « les manuscrits ne brûlent pas ».