Le meilleur est le premier roman de Malamud publié en 1952. Il nous permet de suivre l'histoire de Roy joueur de Baseball dont on ne connait pas grand chose si ce n'est qu'il excelle à ce sport.
Roy n'a qu'une idée en tête, celle de rafler tout les titres, tous les records et marquer l'histoire et avoir ainsi "tout ce qui va avec" comme il le répète souvent sans préciser ce qu'il entend par la.
On suit donc son aventure et son entrée pro dans le club des Knights de New York. Et la: première déception, une fois dans le vestiaire il est déçu. Ce n'est pas comme il l'avait imaginé. Et c'est, je crois, le thème du roman. Le rêve américain désenchanté, la rencontre du fantasme et de l'objet, pourtant Roy est bien le meilleur au Baseball, même pour un néophyte de ce sport comme moi c'est une évidence dès qu'il est sur le terrain il écrase tout.
L'intelligence de Malamud est de nous peindre un personnage brumeux dont on ne sait rien,pas particulièrement attachant, il est un symbole: celui de la performance ultime. Et même le meilleur s'en prend plein la gueule.
D'après Lacan "Le réel, c'est quand on se cogne." Et Roy va se cogner pendant les 300 pages. Il va confronter la représentation qu'il se fait de la réussite à la vrai vie.
Pour montrer à quel point il est dans le fantasme il va tomber "amoureux" de la première potiche venue (ancienne femme d'un joueur à succès) matérialiste débauchée qu'il va fantasmer au point de se la représenter comme femme au foyer des années 50 lui préparant de bons petits plats pendant qu'il est à la pêche.
Le réel c'est dur, alors Roy est triste, il déprime, il fait tomber les records un à un mais il ne comprend pas pourquoi tout ne va pas comme il veut, il se dit que ça ira mieux quand il les aura tous alors il joue encore mieux et fait tomber encore plus de records. Cette fuite en avant mise en scène dans un chapitre magistral dans une sorte de délire complètement halluciné ou Roy mange et mange et mange pour se remplir sans jamais pouvoir calmer sa faim.
Le style direct de Malamud est aussi essentiel et très efficace pour ressentir tous les murs dans lesquels se cogne notre héro.
La performance littéraire réside cependant dans la retranscription des matchs de baseball. Moi qui ne connaissait rien a ce sport l'auteur arrive à nous faire ressentir toute la tension. Je trouvais ce sport mou et sans intérêt je crois que je comprends un peu mieux l'engouement americain. C'est un vrai sport de self-made-man. Tu n'as besoin que d'un balle et d'une batte et tu peux sortir toute l'équipe adverse (je crois) si tu les élimines les uns après les autres. Ca se joue entre toi et le lanceur. Les regards se croisent si tu tapes la balle tu es un héro, si tu la laisses passer tu retournes sur le banc à ta place. Dans l'écriture de Malamud le rendu est plus proche d'un match de boxe que d'un match de sport collectif. Une équipe c est jute une somme d'individualité et Roy est le meilleur, alors il gagne.
Pour ces descriptions sans doute que si un jour à 2h du matin sur W9 je tombe sur je ne sais quelle finale de baseball, je ne zapperais pas. En attendant je vais me lancer dans la suite des romans de Malamud et merci pour cela à la collection rivage pour son travail de réédition