A jamais abîmés, au fond de l'abîme
Jack London est un explorateur.
Le grand nord, on le sait, lui a permis d'accoucher de romans célèbres qui ont bercé la jeunesse de millions d'enfants depuis des générations.
Mais Jack ne s'est pas contenté d'explorer ce que la nature a de beau mais terrible. Il a aussi tenu à se fondre dans ce que la civilisation peut proposer de pire.
Romancier, photographe (Phébus sort cette année un livre magnifique de ses clichés, qui concernent entre autre ce dont il est question ici), explorateur, London est révolté par les conditions de vie de l'east-end, quartier déshérité de Londres au début du siècle.
Sa description est lucide, terrible, amère. S'il a cherché à ne pas en faire un brûlot politique, on sent bien, à chaque page et chaque chapitre, toujours plus terrifiant que le précédent, que sa rage va vers ce système capitaliste absurde qui asservit le plus grand nombre pour enrichir une minorité.
Il existe des combats intemporels. Ce livre est une de ses plus belles armes.
En voici la conclusion:
"La civilisation a centuplé le pouvoir de production de l'humanité et, par suite d'une mauvaise gestion, les civilisés vivent plus mal que des bêtes, ont moins moins à manger et sont moins bien protégés de la rigueur des éléments que le sauvage inuit, dans un climat bien plus rigoureux. Il vit, aujourd'hui, comme il vivait à l'âge de la pierre, il y a plus de dix mille ans."