Alerté par les récents incendies en Amazonie, qui font d'ailleurs toujours ravage à l'heure qu'il est, je décide de lire ce livre (l'histoire de ce roman se déroule là-bas...).
J'ai eu une bonne intuition.
La problématique est digne d'une judicieuse question de dissertation à l'épreuve de Philosophie du baccalauréat : Comment l'homme moderne s'y prend-il pour semer les graines du mal ?
(Qui plus est, insidieusement, dans une tribu vivant en Amazonie !)
Je me souviens d'un sujet de dissertation, en prépa littéraire ("hypokhâgne", pour les intimes). "Faire le bien". Eh bien, ce roman nous propose une réflexion romancée qui prend à la fois le contre-pied ("Faire le mal") mais apporte des éléments de sagesse. Ce livre m'a permis de me livrer malgré moi à un exercice d'introspection. Mon regard sur la société en a été changé. On voit les choses avec beaucoup de recul quand on change d'angle et de point de vue, et en particulier quand on lit attentivement ce livre entre les lignes.
Laurent Gounelle parvient, grâce à une plume fine et riche en images que nous considérons comme "exotiques", à nous embarquer dans une aventure où le choc culturel entre l'homme moderne et l'homme "primaire" provoque des situations tantôt drôles, tantôt graves, voir dramatiques. Le héros, philosophe de son état, nous guide dans une réflexion profonde sur l'Humain, son fonctionnement, ses blessures, sa psychologie... et sur la beauté des choses simples. Les thèmes de réflexion sont variés : l'émerveillement, l'acceptation du moment présent et son accueil dans notre être, la philosophie "cueille le jour" propre aux peuples qui vivent dans l'abondance de simplicité.
J'ai beaucoup apprécié la fraîcheur de ce roman, en particulier les couleurs des descriptions de la forêt Amazonienne. L'auteur nous incite à méditer sur nos motivations de destruction, et la soif de "toujours plus" qui nous pousse souvent à sur-consommer. Ce qui ne nous rend pas plus heureux, et c'est là où l'auteur arrive à toucher là où ça fait mal dans notre monde.Cette lecture a alimenté en moi l'envie de m'orienter vers un changement de vie, respectueux de moi-même et de l'environnement qui me permet d'être moi-même, au bon endroit, au bon moment, à ma place, bref : en accord avec moi-même.
A l'inverse, c'est fou de voir les trésors d'inventivité que "l'homme blanc" déploie pour pervertir le cœur de peuples sauvages. Si je laisse parler l'impression que j'en ai, c'est comme si l'auteur retraçait l'histoire de Big Brother tel que nous le vivons actuellement (regardez bien, si si, vous avez en ce moment sans doute votre smartphone dans la poche, comme moi, et un écran sous les yeux, comme des milliards de gens, et puis, vous verrez sans doute la télé ce soir, après avoir passé votre journée à travailler pour gagner le salaire que vous dépenserez en achetant des objets dont vous n'avez pas besoin pour être heureux).
A chaud, après avoir terminé de lire cet ouvrage proche du conte philosophique sur la forme, et proche de la révélation sur le fond, je suis triste. Cela me rappelle que je passe à côté de ce qui fait la saveur d'une vie : les choses simples, la nature, la pureté de l'air que l'on respire et des animaux qui nous entourent. La cascade d'une rivière. Les senteurs des sous-bois. La vie sous toutes ces formes. Quel tour de force de parvenir à me reconnecter à tout ça grâce à la lecture de ce roman !
Je suis triste, donc, mais, comme Sandro, j'ai envie de suivre mon instinct.
C'est décidé, je pars déchiffrer un nouveau terrain : moi aussi, je serai écrivain.
Quitte à vivre en philosophe, autant "penser en homme d'action et agir en homme de pensée" ! (Bergson, je crois... pas Marc-Aurèle ! Chacun ses références...)
Laurent Gounelle, Merci.