La tour sombre se veut une grande fresque épique et cette première pierre propose en conséquence un univers particulièrement riche, jalonné de nombreuses questions. Pourtant, la beauté froide de ce tome ne repose pas en ce monde étrange qui a changé, peuplé d'êtres en proie aux mutations, où les frontières de l'espace se troublent et où le temps a perdu de sa rigidité, ni dans toutes les questions laissées en suspens.
C'est davantage dans une intrigue minimaliste, empruntant ouvertement son symbolisme aux westerns, porté par une écriture rigoureuse, descriptive et introspective que "Le Pistolero" parvient à briller. Le dernier des pistolero, dont nous ignorons pour un temps le nom, pourchasse l'homme en noir à travers le désert. Sa traque dure depuis trop longtemps mais à mesure qu'il progresse, l'avance de son opposant, sa némésis maléfique dont les pièges pervers ne cessent de se multiplier, diminue et le pistolero gagne du terrain.
Dans un monde - si ce n'est pas des mondes? - ravagé, meurtri et au bord du gouffre sans qu'aucune raison claire ne soit avancé, le pistolero progresse. Chaque rencontre est un fait rare, chaque rencontre recèle son lot de dangers et nous en révèle plus sur un héros charismatique, taciturne et au passé de toute évidence douloureux, dans la grande tradition des protagonistes de western.