Un narrateur, à la fois vrai tocard et faux (?) espion pour le compte des services de renseignements français (?), se demande ce qu’il fait là. Là, c’est L.A., Los Angeles, la ville automobile par excellence, tandis que le narrateur n’a pas le permis ; pire, il ne sait pas conduire (et je connais des pilotes du samedi soir qui font la différence). Sa mission : enquêter sur Britney Spears. Or, il le sait très bien, enquêter est la plus floue des missions, ma concierge enquêterait sur ses locataires si j’avais une concierge, ma grand-mère enquête sur ses voisines, il m’arrive moi-même d’enquêter sur n’importe quoi. Pour information, il enquêtera tant et si bien sur l’inoubliable interprète de Oops!… I Did It Again qu’il tombera sous le charme de Lindsay Lohan…
Si on veut être précis, le narrateur est censé protéger Britney Spears d’un hypothétique enlèvement – d’où l’un des sens du titre du roman – par quelque groupuscule vaguement islamiste dont on n’entendra guère parler. Du coup, l’essentiel de son travail consiste à pister la starlette, quitte à ce que ses activités ne diffèrent en rien – sinon par les revenus – de celles de n’importe quel paparazzi, à commencer par ce François-Ursule de Curson-Karageorges, FUCK pour les intimes, un étrange expat’ dont il finira par se rapprocher.
Pour ajouter encore une touche de glamour, tout cela est raconté depuis le Tadjikistan, où le narrateur a été muté avec pour objectif de relever les plaques d’immatriculation des véhicules franchissant la frontière chinoise, après une phase d’exfiltration en comparaison de laquelle tirer une chasse d’eau est un modèle d’échappatoire réussie…
Rassurons le lecteur de cette critique : l’ensemble est beaucoup moins con qu’il en a l’air, le récit réservant par ailleurs son lot de rebondissements et de digressions plus ou moins oiseuses. Par ailleurs, le narrateur est particulièrement porté sur l’introspection (« Parfois, je souffrais de mélancolie (il arrivait même que j’éprouve du regret d’avoir abandonné mon chat), et, dans ces moments-là, il fallait que je marche interminablement, pour retrouver une humeur égale, dans cette ville où ça ne se fait pas », p. 175 en « Folio ») et en même temps si perméable à la société de consommation, si confondant d’honnêteté qu’il peut déclarer : « En repassant devant le strip-tease, je me rappelai que cela faisait longtemps que je n’avais pas eu d’activité sexuelle et je me promis d’y remédier prochainement » (p. 139). Comme dans les Événements, du même auteur, on dirait que c’est Droopy qui raconte, ou si ce n’est pas Droopy, alors c’est le type le plus désabusé et je-m’en-foutiste de la planète,
En fait, une des limites du Ravissement de Britney Spears, outre que ce roman ne figurera définitivement jamais au rang des classiques, est qu’il donne l’impression, peut-être trompeuse, que Jean Rolin n’a jamais rien écrit que selon ce point de vue.

Alcofribas
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le 2 août 2018

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