Etrange récit assez envoûtant que ce "Renard" qui désigne à la fois le goupil voleur de poules et le jeune Henry, ambitieux prétendant aux dents longues, familier de la ruse et des artifices pour parvenir à ses fins.
March et Banford sont deux femmes anglaises qui s'installent dans une ferme à l'issue de la Première Guerre mondiale. On ne connaît pas l'histoire particulière de ces deux amies qui, à trente ans passés, sans mari, sans enfants, décident d'élever poules et canards. Inexpérimentées, peut-être un peu utopistes, elles vivotent plus qu'elles ne vivent de leur activité agricole. Un beau jour, arrive un jeune homme en uniforme canadien, il est le petit-fils de l'ancien propriétaire de la ferme. Rapidement, il conçoit le dessein de séduire March, cette forte femme aux allures viriles qui fend le bois, dresse des palissades, nourrit la volaille et porte pantalon et bandes molletières. Un plan à deux inconciliable avec le trio que forment deux femmes et un homme.
Lawrence plante le décor en quelques pages et donne une atmosphère à la fois poétique par le spectacle de la nature et oppressante par la mise en place de ce huis-clos paysan qui enferme une poignée de personnages dans un drame latent jusqu'au dénouement.
Le récit semble tout d'abord inoffensif avant que l'atmosphère et les relations entre protagonistes se tendent et s'intensifient. On ne peut pas parler de suspens mais réellement de tension. J'ai apprécié cette narration bien qu'à mon sens, Lawrence, sous l'apparence de mettre en scène de manière moderne des femmes indépendantes, nuise finalement à ses héroïnes dont il prépare l'asservissement à l'homme par leur incapacité à échapper aux calculs et à la ruse de l'homme-renard.
"Le Renard" n'est pas un roman d'amour, c'est un roman de domination, celle du mâle sur les femelles. L'histoire de l'Humanité ?