On ne badinne pas avec Stendhal..
Laissons parler notre esprit critique et flagellons de coups invisibles notre ennemi littéraire imposé par nos professeurs de Français nous demandant d'analyser et de lire entre les lignes.
Étonnant autant qu'étonnée, je dois me laisser porter à croire que ce livre m'a particulièrement plu et que Stendhal a vite pris une place importante dans mon cœur. Oui. Je le revendique: j'aime Stendhal. Est-ce mal? Est-ce bien? Qui peut en juger? Allez savoir...
Oui. Le Rouge et le Noir est un livre passionnant et immoral, à mon goût, ce qui lui donne autant de droit d'être aimé. Vous vous demanderez peut-être ce qui me pousse à dire que ce livre est immoral, et bien laissez moi répondre à cette question muette de votre esprit.
Julien Sorel est un être perverti par Napoléon et par les différences de classes. C'est un grand stratège pour qui aucune décision ne se justifie sans l'idée de combat. Son idéal guerrier perdu à jamais dans la mort du corps (et de l'esprit?), il fera en sorte de le perpétuer par ses faits et gestes. Il use de sa beauté enfantine, de ses traits qui font fondre les dames si haut placées dans la société pour pouvoir s'élever lui-même. Il entreprend ainsi son ascension sociale, en usant de séduction. Il sera tantôt hésitant à accéder au pouvoir social par le Rouge de l'uniforme militaire ou par le Noir du clergé. C'est un jeune homme fier, orgueilleux, ambitieux, détestant être méprisé mais méprisant lui-même. Sa face cachée se révèle aux yeux des personnages du livre et du lecteur au fur et à mesure qu'il avancera dans sa lecture.
Mais Julien Sorel, malgré cette description peu valorisante et même légèrement péjorative, est celui qui m'a donné le goût de lire ce livre d'une grosseur déconcertante. Oui, Julien Sorel s'émancipe tout à long du livre et donne envie au lecteur de s'émanciper. Oui, Julien Sorel est un héros romantique qui réussira à dresser sa propre statue de rebelle au destin tragique. La complexité de ce personnage est approfondie au point que je n'ai pu me résoudre qu'à aimer ce pauvre garçon.
De plus, je me dois d'ajouter qu'il est le seul et unique personnage dans ce roman à m'avoir véritablement intrigué. Les autres ne sont que futiles et inutiles pour moi mais... Je sais qu'ils ne le sont point pour lui et qu'ils se doivent d'être là. Mais je ne peux m'empêcher de n'apprécier aucune des ''amourettes'' de ce petit paysan qui est pour moi le seul à être intéressant. Certes, je dois avouer qu'à la lecture de la simplicité du prince russe Karasoff, un léger sourire a effleuré mes lèvres.
Parlons peu, parlons bien. Le fait que les personnages soient plaisants ou non n'est pas la seule raison qui fait qu'un livre est apprécié. Notamment, j'aime beaucoup le style d'écriture de Stendhal. Pourquoi me plaît-il? Je me pose exactement la même question. Je n'ai pas vraiment de critères sur ce genre de chose mais je sais pourtant que chaque écrivain a un style unique qui peut paraître au lecteur semblable à un autre, mais bien entendu, c'est faux. Cela reviendrait à dire que Balzac et Stendhal écrivaient de la même manière, alors que Balzac est bien plus poussé dans les descriptions et les phrases d'une page que Stendhal. Mais bon, je me perds.
Les dernières pages de ce roman sont sûrement les plus belles et la décapitation de ce cher Julien Sorel qui mourra dignement sur l'échafaud et décrivant sa mort comme s'il maîtrisait jusqu'au bout sa vie auront eu pour moi l'effet de le remonter d'un coup dans mon estime.