Cette SF un peu vieillotte...
Kip est un ado du New Jersey, dont le père le pousse à faire des études. Passionné par la conquête spatiale, il n'a hélas pas de chances de faire d'études, vu les ressources de ses parents. Mais son plus grand rêve est d'aller sur la lune. Il participe de manière forcenée à un concours organisé par une boîte de savon. Mais au lieu du premier pris, un voyage, il gagne une combinaison spatiale, qu'il entretient et améliore amoureusement. Comme elle ne lui sert pas, il décide de la vendre, mais se permet une dernière balade au clair de lune. C'est alors que deux soucoupes volantes s'écrasent sous son nez.
Notre héros est ensuite détenu par un alien insectoïde à l'intellect supérieur (surnommé le Cancrelat par le héros) qui s'est allié avec deux gangsters grotesques. Dans sa détention, il se lie avec Tom-Pouce, la fillette d'un grand savant, à la fois très intelligente, très peste, et très attachée à sa poupée. Il y a aussi un alien dont je n'ai pas bien compris l'apparence (je l'imagine comme une mangouste), qui parle par des sons musicaux, et que la traduction française a rendu par "Maman-Bidule". De nombreuses péripéties s'ensuivent, d'abord sur la Lune (randonnée pour s'enfuir), puis sur Pluton (traverser un pont sur un fleuve de métal liquide, à température proche du zéro absolu, pour activer une balise de détresse). Puis un long segment sur la planète de Maman-Bidule, sorte d'utopie ultra-éclairée. Puis un passage devant le tribunal d'un équivalent de l'ONU, mais pour les trois galaxies. Nos héros arrivent in extremis à obtenir un renvoi de l'examen de la nocivité de la race humaine pour dans 80 000 ans. Chacun retrouve son chez-soi, et l'Humanité reçoit même en bonus une tablette couverte de chouettes équations qui vont permettre de faire de sacrés bons en avant. A la fin, Kip reçoit une bourse du MIT pour services rendus à l'Humanité, mais retourne dans la pharmacie où il bossait à mi-temps et cloue le bec au bully du coin.
Tout cela fleure à plein nez les années 1950. Dans la partie décrivant les civilisations avancées de l'espace, j'avais l'impression de lire une novélisation d'une BD de Carl Barks. C'est délicieusement désuet. C'est étonnant, d'ailleurs, car d'autres passages font plus adultes. Heinlein étend ainsi tous les passages dans lesquels le héros souffre.
La Terre, bien sûr, est menacée d'une invasion par les Cancrelats, mais va être sauvée par leur condamnation par le tribunal galactique. Réflexion sur le caractère relatif de la technologie. Mais en même temps, on reconnaît la patte de passionné de science d'Heinlein. L'auteur prend visiblement plaisir à décrire en détail le fonctionnement du costume spatial (que le héros surnomme affectueusement Oscar), à détailler les calculs qu'il fait pour déterminer la vitesse hallucinante à laquelle les soucoupes voyagent à travers les galaxies. Difficile, dans ces moments-là, de croire encore que notre héros est un simple teenager des années 1950.
Ce n'est pas un mauvais Heinlein, mais ce n'est pas son ouvrage le plus original, au contraire. Le rythme est un peu étrange, et on nage en pleine iconographie de la SF des fifties, au point que l'auteur se sent obligé d'y ajouter une petite dose de dérision et pas mal de blagounettes.