En 1980, un vent de liberté souffle sur la Corée du Sud. Le « Printemps de Séoul » espérait encore faire de la Corée une démocratie loin des gouvernements militaires et le « Mouvement pour la Démocratisation de Gwangju » n’avait pas encore été réprimé dans le sang.
Le Vieux Jardin est une adaptation du roman éponyme de Hwang Sok Yong. Si le film suit une trame narrative assez littéraire, il échappe au rythme tranquille des pages qui se tournent. On y rencontre Ho Hyun Woo, vieillit par son long emprisonnement, redécouvrant souvenirs après souvenirs, amitié après amitié, témoignage après témoignage le jeune et espiègle homme qu’il fut. Finalement c’est son rendez-vous raté avec la vie, son brasier d’amour à jamais étouffé, ses rêves de jeunesse réduis au silence que le Vieux Jardin raconte. Et à travers cette histoire humaine, c’est l’histoire coréenne qui se révèle à l’écran.
Im Sang Soo rend hommage à ses contemporains disparus, avalés par la répression de 1980. Et pause subtilement la question de la valeur des luttes. Plaçant les militants réprimés dans la perspective de leur échec, Im Sang Soo conclue, toutefois, sur une note pleine de beauté et d’espoir. Il rend ainsi un immense hommage à ceux qui participèrent à la démocratisation de la Corée.
Au delà de la romance tragique que vivent les personnages du Vieux Jardin, le film parlent de l’histoire résistante de la Corée. Derrière la jeunesse dévorée par la dictature en 1980 se cache un lignage résistant dont les racines sont dans les mouvements pour l’indépendance lors de l’occupation japonaise.
Le Vieux Jardin est, à mon sens, un chef-d’oeuvre. C’est un film équilibré et poétique qui met davantage l’accent sur le sens que sur la forme. Sans grande prouesse technique que l’effacement de la réalisation, le film est une perle scénaristique qui donne fortement envie de lire le livre. L’hommage rendu à la culture résistante – qui traverse la culture coréenne et qui est bien antérieur à la Guerre de Corée ou même à la colonisation Japonaise – est profondément émouvante.
La représentation des femmes que Im Sang Soo parvient à extirper du tropes coréen de la mère sacrifiée est incroyable. Enfin pour ceux qui connaissent l’histoire moderne de la Corée du Sud ne pourront qu’essuyer plusieurs larmes. Film politique, poétique et historique le Vieux Jardin apporte un regard sur la Corée du Sud qui nous est rarement accessible. Si l’on venait à l’avenir à me demander : « Pourquoi la Corée ? » Il est fort à parier que je répondrais : « La réponse est dans le Vieux Jardin. »
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