Quand le Langage devient langage
Voici le China Mieville annuel après un Kraken en demi-teinte et on peut dire qu'il s'est merveilleusement rattrapé car Embassytown est surement son meilleur roman à ce jour.
Dans un cadre de Science-Fiction on y suit le personnage Avice Benner Cho résidente de la particulière Embassytown. Une ville et un univers qui seront décris avec brio par Mieville ; en prenant son temps pour poser le décors, en s'éloignant d'un cadre "terrien" qui pourrait servir de référence facile et en utilisant avec justesse néologisme et mots-valises il parvient à doucement nous immerger dans ce monde alien. Comme pour Perdido Street Station tout cela est si dense qu'il y a matière à faire plusieurs autres romans dans le même univers (ne serait-ce que sur l'immer et ses navigateurs).
Mais qu'on ne se trompe pas Avice n'est pas l'héroïne du roman, tout juste une narratrice des évènements dont elle est témoin comme pourrait l'être n'importe lequel des autres protagoniste. Et l'Embassytown de la couverture n'est qu'un cadre pittoresque des aventures du véritable protagoniste : le Langage. Plus que les créatures le parlant, les étranges Hôtes, le Langage et le langage sont au coeur du roman.
Une magnifique réflexion sur comment le langage façonne notre raisonnement et notre culture. De la complexité à comprendre un langage dont la base même nous est inimaginable (l'impossibilité de mentir dans la forme la plus large possible) au pouvoir qu'à le langage de façon général (l'art des orateurs de transformer les mots pour leur enlever tout sens et ne garder que des sons enivrants). Le tout est, heureusement, servi par la prose fluide et admirable de China Mieville
Le Langage est l'intrigue, le langage est intrigue, le langage intrigue.