Bibliothèque désincarnée

Dans un autre roman ("Péplum"), Amélie Nothomb se définit comme "dialoguiste" plutôt que comme "romancière". C'est sans doute là le principal problème de ce livre qui comporte quasiment exclusivement les dialogues de trois personnages : un professeur de littérature, son assistant et une étudiante séduite par ce dernier (puis un peu par le professeur).
Dans un pays en guerre, qui pourrait être la Bosnie ou le Kosovo, ces personnages en viennent à brûler les livres de la bibliothèque du professeur chez qui ils se sont réfugiés, pour lutter contre un froid omniprésent.
Si l'idée est intéressante, par-delà le fait que le papier dégage plus de flammes que de chaleur, le roman (la pièce de théâtre ?) ne parvient guère à susciter un attachement à ces trois personnages assez désincarnés. On regrette surtout qu'Amélie Nothomb n'ait pas été au bout de son raisonnement en prenant une "vraie" bibliothèque. Qu'il eut été plus fort de la voir hésiter entre Voltaire et Guy des Cars, ou bien entre Maupassant et d'Ormesson, ou entre Nothomb et Kundera?
Là, il y aurait eu un véritable jeu de massacre, alors qu'elle en reste à des livres fictifs qui n'évoquent pas grand chose.
On se console quand même avec quelques répliques bien senties, mais on a du mal à ne pas brûler le livre avant de l'avoir fini...