Les démons est le roman le plus ambitieux de Dostoïevski
Bien que l'intrigue principale mette du temps à se mettre en place, les confrontations qui naissent des différences idéologiques et personnelles entre les personnages permettent d'apercevoir un avant-goût de la suite. Un des points forts du livre (et de toute la bibliographie de Dostoïevski en général mais en particulier ici) est son nombre élevé d'acteurs qui interagissent tous entre eux, c'est parfois bien géré, parfois non, ici c'est parfait.
Où la plupart des livres sont centrés sur un personnage principal, Les Démons vit à travers plusieurs points de vue principaux, celui de Stepan Trophimovitch, de Stravoguine, de Piotr, de Chatov, de Julie Mikhailovna et du gouverneur, le livre offre une parfaite vue d'ensemble sur les évènements.
Pour en revenir sur l'histoire principale, tout est magnifiquement articulé, chaque personnage a sa propre idée et tout semble suivre une route précise, comme si les personnages étaient "condamnés" par le destin à agir ainsi. Les motivations personnelles de chacun sont claires (peut-être moins pour Stravoguine mais le chapitre Chez Tikhone résout ce problème) et aucune d'entre elles ne s'élèvent au dessus des autres, ça donne au livre un aspect de lutte homérique entre les personnalités.
Ce que je note toutefois (et c'est potentiellement le point positif qui m'a fait mettre cette note au livre) c'est le dénouement de l'intrigue. Tous les héros des romans de Dostoïevski, après une lutte acharnée trouvent une certaine rédemption (Pour Raskolnikov ça passe par l'amour avec Sonia, pour Aliocha ça passe par l'espoir à travers la potentielle fuite de son frère Mitia) mais dans ce livre il n'y a rien qui attend nos personnages, rien si ce n'est la mort et la désolation, tous y passeront un par un comme s'ils étaient châtiés, comme s'ils étaient des véritables démons et qu'aucun espoir n'était envisageable pour eux. L'exemple le plus flagrant qui me vient en tête est Chatov qu'on dépeint tout au long du livre comme un homme triste et damné mais qui retrouve espoir en la vie après la naissance de "son" fils pour finir un jour plus tard une balle dans la tête.
PS : Mes personnages préférés sont Piotr Stepanovitch, Kirilov et Chatov