Je ne peux pas battre le titre du livre en jeu de mot.

Un sacré livre que ce Désorientés. Acheté au pif dans une librairie pour meubler les vacances de Noël (ce qui, au vu de la date à laquelle je publie, n'a évidemment pas fonctionné comme ça), il m'a très agréablement surpris: je ne connaissais pas Maalouf, ni ses oeuvres.

Le sujet avait l'air intéressant: un homme revient au Levant, son pays d'origine, dans lequel il n'est pas revenu depuis son émigration, pour revoir un ami à l'article de la mort. A cette occasion, il essaiera de réunir leur groupe d'amis d'enfance, dispersés à travers le monde. Le livre parlera de l'attitude de chacun des membres d'un groupe d'ami face à la guerre et à la destruction de leur pays, de l'opinion qu'ils ont d'eux-mêmes, des autres, des religions, etc...

Sur le fond, c'est un livre extrêmement intéressant, fait d'opinions, de doutes, de regrets, de questionnements intimes. Pour ceux qui aiment l'action, vous allez vous emmerder, mais pour ceux qui aiment se triturer les méninges avec ce qui aurait pu, ce qui aurait dû, ce qui aurait été, avec les situations philosophiquement compliquées, tout ceci est pour vous.

Finalement, on y voit assez vite que tous les protagonistes, qu'elle qu'ait été leur réponse face au chaos, sont perdus. Ils ne savent pas, au fond, s'ils ont eu raison. S'ils ont rejoint le camp des gentils. S'ils ont été lâches, ou courageux.

C'est à ces interrogations profondes des personnages que je me suis pour ma part identifié. En France, nous ne sommes pas en guerre, il n'y a pas de clans, d'enlèvements, de corruption systématisée. Mais, comme partout, je crois que nous faisons face à de plus en plus de situations philosophiquement complexes où il est difficile de savoir si l'on fait bonne route ou non, où il y a du bon et du mauvais dans chaque solution proposée, où on préfèrerait, au fond, ne pas avoir à choisir.

Ajoutez à cela quelques réflexions très pertinentes de l'auteur sur le monde arabe, l'islam, le vivre ensemble au Levant, l'émigration en France, etc... Un exemple: la différence de perception des Juifs entre l'Occident et l'Orient, avec pour l'un un traumatisme de la SGM et pour les autres le traumatisme de l'invasion et l’humiliation des défaites successives.

Quoiqu'il en soit, c'est un ouvrage qui fait réfléchir, qui fait se poser des questions difficiles et qui paradoxalement est très léger et se lit rapidement.

9/10 à cause de la fin qui laisse un goût amer d'inachevé.

Coup de coeur 2020 !